Jour : 1 avril 2020

  • La Cobac anticipe sur une crise bancaire dans la Cemac

    C’est une lettre circulaire lourde de sens que le secrétaire général de la Commission bancaire de l’Afrique centrale (Cobac) a adressée, le 25 mars 2020, aux directeurs généraux des établissements de crédit, de microfinance et des holdings financières présentes dans la sous-région. Cette correspondance de Halilou Yerima Boubakary fait référence à la gestion des risques induits par la pandémie du Covid-19, qui cause depuis plusieurs semaines un ralentissement de l’activité économique à l’échelle mondiale.

    « Les économies des pays membres de la Cemac étant fortement dépendantes des cours des matières premières, cette pandémie impactera la croissance économique, les politiques budgétaires des Etats en raison des fluctuations de prix du baril de pétrole, ainsi que l’activité et la rentabilité du système bancaire de la région », prévient le secrétaire général de la Cobac.

    La situation est en effet alarmante pour les Etats membres de la Cemac (Cameroun, Congo, Gabon, Guinée Equatoriale, République Centrafricaine, Tchad), dont les économies dépendent essentiellement du pétrole. Selon le directeur de l’Agence Internationale de l’Energie (AIE), Fatih Birol, la demande mondiale de pétrole pourrait chuter de 20% en raison de la multiplication des mesures de confinement, qui touchent désormais quelque trois milliards de personnes dans le monde. On pourrait bien assister au cours de cette année à une chute de la demande d’environ 20 millions de barils par jour selon certains, ajoute-t-il.

    La Cemac ne peut y échapper et cela aura indubitablement un impact sur son économie, et donc sur son secteur bancaire. Bien que difficile à en déterminer l’ampleur et la durée dans le temps, « l’impact de cette crise sanitaire mondiale affectera la capacité de remboursement de plusieurs débiteurs, avec pour corollaire la dégradation de la qualité des portefeuilles de crédits et, partant, la rentabilité des établissements », craint la Cobac. L’institution envisage de ce fait « une forte augmentation des expositions non performantes et des pertes (…) qui pourraient dégrader significativement l’adéquation des fonds propres et la liquidité des établissements de crédit et de microfinance de la Cemac ».

    Règlementation prudentielle

    Suffisant pour que le régulateur du secteur bancaire invite les banques et les microfinances à s’appuyer sur la règlementation prudentielle mise en œuvre par ses soins, pour y puiser diverses dispositions dont l’application devrait permettre de faire face à la crise bancaire qui se profile à l’horizon et de soutenir l’activité du secteur dans la sous-région.

    Ainsi, au sujet de la qualité du portefeuille des crédits, la Cobac demande aux établissements de crédit et de microfinance d’effectuer une revue de leur portefeuille et d’évaluer les risques en conformité avec les dispositions réglementaires, à leurs procédures et aux bonnes pratiques pour évaluer l’impact du Coronavirus (Cocid-19) sur leur situation financière.

    « Une prudence doit être observée en cas de restructuration des prêts accordés à des entreprises appartenant à des secteurs fortement touchés par la crise », instruit Halilou Yerima Boubakary. Cela consisterait, souligne-t-il, à renégocier les conditions de leur octroi, notamment les échéances, les taux d’intérêt, les commissions. Il s’agira également de discuter des moratoires ou des périodes de grâce à accorder à ces entreprises.

    Toujours sur la base de la réglementation, le secrétaire général de la Cobac demande que le statut des expositions et le niveau de provisionnement soient réévalués de manière régulière pour tenir compte de l’évolution de la situation des contreparties et du contexte économique général. Par ailleurs, informe le régulateur, les financements supplémentaires ou l’octroi de nouveaux crédits aux entreprises ayant subi les effets du Covid-19 pourraient faire partie d’un processus de restructurations des prêts. Ces entreprises devront cependant observer une gestion transparente et prudente des risques. Encore que les financements supplémentaires se feront en tenant compte de la capacité réelle de remboursement du débiteur.

    Distribution des dividendes

    Autre prescription de la Cobac, c’est qu’une politique de distribution des dividendes plus restrictive soit adoptée par les banques et les microfinances. En effet, parlant de la solvabilité, elle indique que l’absorption des pertes subies du fait de la crise sanitaire actuelle sera imputée sur le volant de conservation des fonds propres porté à 2,5% des risques pondérés depuis le 1er janvier 2019.

    « Les établissements de microfinance sont tenus de de prendre des mesures appropriés pour s’assurer que le niveau de leurs fonds propres patrimoniaux nets reste suffisant pour faire face aux conséquences présentes et à venir de la pandémie », souligne la Cobac. Qui demande aussi que les coussins de liquidités soient utilisés car l’impact du Covid-19 pourrait affecter le financement et les positions de liquidité des établissements de crédit et de microfinance, suite au double effet d’importants retraits et de la diminution des versements.

    En définitive, écrit le secrétaire général de la Cobac, les acteurs du secteur bancaire au sein de la zone Cemac doivent élaborer, dans le respect des exigences prudentielles et comptables, des plans d’évaluation et de gestion des risques. Ils devront par ailleurs soumettre au régulateur du secteur un plan de restauration de leurs fonds propres prévoyant une augmentation progressive de leur capital social. Tout un plan de guerre pour contrer les effets du coronavirus sur le secteur bancaire…

    Continuité des activités bancaires

    La Commission bancaire de l’Afrique centrale ne s’est pas limitée à demander aux banques commerciales de la sous-région d’anticiper sur la probable crise qui risquerait de secouer le secteur à cause de la pandémie du Covid-19. La Cobac invite en effet les établissements de crédit et de microfinance à tester leur plan de continuité d’activité élaboré conformément aux dispositions du Règlement Cobac R-2008/01 afin de pouvoir l’activer à tout moment. Il est demandé aux banques de garantir l’offre continue des services de dépôts et de prêt, le fonctionnement des distributeurs automatiques de billets, la gestion des expositions aux marchés financiers et aux contreparties ainsi que le maintien du système de paiement.

    Les banques et les établissements de microfinance devront donc prendre toutes les dispositions pour la mise en œuvre de plusieurs mesures : identifier des employés clés pour la fourniture des services essentiels ; créer des équipes pour toutes les fonctions critiques du personnel ; élaborer un plan qui distingue le travail à faire au bureau de celui pouvant être exécuté à domicile, en mettant en plan un plan d’affectation de personnel et de moyens ; déployer des installations éloignées et redondantes pour les activités devant être effectuées à partir d’emplacements centralisés…

    En sus des étapes supplémentaires demandées, le secrétaire général de la Cobac précise que c’est à l’organe délibérant de superviser l’élaboration d’un plan dédié à la lutte contre la pandémie du coronavirus et de l’approuver en dernière instance tout en s’assurant que l’organe exécutif dispose de ressources nécessaires pour sa mise en œuvre. S’agissant particulièrement des établissements de microfinance, Halilou Yerima Boubakary recommande fortement à leurs dirigeants sociaux de s’assurer de la mise en œuvre du maximum des actions formulées dans sa lettre circulaire.

  • Prets bancaires: les mauvais payeurs toujours impunis

    Où en est-on avec l’application de la loi contre les mauvais payeurs du secteur financier, trois mois après sa promulgation ? Pour ce qui du secteur des microfinances caractérisé par un taux de faillite haussier, le ministère des Finances explique qu’une loi a été promulguée en vue de sanctionner les mauvais payeurs. Trois mois après, indique le ministère des Finances aucune sanction n’a encore été prononcée car, « la mise en place des instruments coercitifs se met progressivement en place ».

    Bien plus, le Conseil national du crédit note des dysfonctionnements sur sa plateforme intégrée baptisée « Fibane [Fichier bancaire national des entreprises]/CIP [Centrale des incidents de paiement]/Casemf [Cadre de suivi de l’activité des établissements de microfinance] ». C’est un outil automatique de collecte, d’agrégation, d’analyse, de synthèse et de diffusion des données dans le but de la transparence du marché, de la supervision et du contrôle. L’information est collectée au niveau des établissements de crédit et ceux-ci y ont accès grâce au code d’accès qui est mis à leur disposition.

    Si le CNC fait une bonne appréciation de la plateforme, la structure note toutefois que les établissements de crédit ne s’en servent que moyennement pour améliorer la prise de décision. « Du côté des bénéficiaires, la plateforme Fibane/CIP/Casemf est moyennement connue et sa portée sur la transparence des transactions bancaires reste limitée, car la plateforme n’est pas systématiquement renseignée. De plus, les établissements de crédit continuent de privilégier la relation client », apprend-on du CNC. Qui comptabilise seulement 38 812 requêtes formulées par les établissements de crédit et les entreprises.

    Dans cette veine,  explique-t-on à la Commission bancaire de l’Afrique centrale (Beac), promoteurs d’établissement de microfinance (EMF) mènent encore un plaidoyer pour que, par exemple, le PCA soit exclu du champ d’application du dispositif des sanctions pécuniaires. Les banquiers et les EMF proposent que le montant de ces sanctions soit aligné sur le résultat brut d’exploitation ou sur le chiffre d’affaires de la non-conformité de l’établissement. Il est aussi demandé à la Cobac de fixer un montant forfaitaire à l’encontre de l’établissement dont le résultat brut d’exploitation (RBE) pourrait être négatif ou insignifiant. Les acteurs du secteur veulent également que les taux et les plafonds de ces sanctions soient revus à la baisse de même que les montants des sanctions en cas d’infractions multiples.

    Pour les banquiers et promoteurs d’EMFs, la notion de « responsabilité directe et personnelle des dirigeants sociaux » doit être précisée. En plus, les fonds collectés au titre des sanctions pécuniaires doivent être reversés aux associations professionnelles des établissements de crédit et d’EMFs, au Conseil national du crédit et au fonds de garantie des dépôts à créer pour les établissements de microfinance. Il est par ailleurs été demandé à la Cobac de tenir notamment compte du risque de réputation des personnes morales et physiques faisant l’objet de publication des sanctions pécuniaires.

    Pour la Cobac, le PCA d’une banque ou d’un EMF est soumis aux sanctions pécuniaires en tant que dirigeant social comme prévu par le règlement sur le traitement des établissements de crédit en difficulté. De ce fait, il peut, en raison de sa fonction, influencer directement ou indirectement la gestion d’un établissement

    Cartographie des mauvais payeurs

    Dans le secteur bancaire, le Conseil national du crédit révèle que les sociétés à capitaux majoritairement détenus par le gouvernement figurent parmi les entreprises reconnues comme de mauvais payeurs. Sans révéler les identités, le CNC se réfère aux dernières données disponibles et consolidés qui indiquent qu’à fin 2017, la dette de ces entreprises représentait près de 2 400 milliards FCFA.

    Les entreprises sont pourtant préférées par les banques au détriment des particuliers selon la Banque centrale (Beac. Car, en plus de capter la majorité des crédits accordés aux entreprises au Cameroun, les grandes entreprises bénéficient également de taux d’intérêt nettement plus attractifs.

    En effet, dans un rapport sur les taux débiteurs dans la zone Cemac, pour la période allant de juillet à décembre 2018, la Beac révèle que les particuliers camerounais ont payé deux fois plus d’intérêts sur les crédits bancaires que les grandes entreprises. Concrètement, au cours de la période sous revue, les prêts aux particuliers ont été frappés de taux d’intérêt moyens de 15,4 %, contre seulement 7,8 % pour les grandes entreprises installées dans le pays.

    « Cette cherté du crédit aux particuliers peut s’expliquer par la frilosité des banquiers, qui ont encore en mémoire la crise du secteur bancaire au Cameroun intervenue à la fin des années 80. Dans le même temps, l’augmentation continue des créances douteuses dans le portefeuille des banques n’est pas pour encourager les banquiers à délier les cordons de la bourse, sans prendre le maximum de précaution », explique la Beac.  

  • Coronavirus : Paul Biya crée un fonds d’un milliard de FCFA

    L’annonce a été faite par le Premier ministre Joseph Dion Ngute, dans un communiqué signe le 31 mars 2020. Ce fonds de solidarité, qui sera abondé en urgence à hauteur d’un milliard de FCFA, va servir au financement des opérations relevant de la stratégie de riposte contre la pandémie de Coronavirus au Cameroun. 

    Lire aussi : Prospectives économiques : le ministre des Finances ausculte l’année 2021

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