Coup de théâtre, lundi dernier
4 mai 2020, à la Cour suprême du Cameroun. La plus haute juridiction de droit
commun vient d’opérer un retentissant revirement sur l’affaire Marie Solange
Ntometane/Chanas assurances S.A. La Cour est revenue de façon spectaculaire
sur son arrêt rendu le 6 juin 2019, après 27 ans de procédure. Arrêt qui
ordonnait « la restitution, par la société Chanas Assurances S.A à Louis
Laugier de ses 4 500 parts sociales ».
L’arrêt mentionnait
clairement « qu’en conséquence de la mainlevée prononcée à l’égard de
l’ordonnance sur requête n°1181, rendue le 8 mars 1993 par le président du
tribunal de première instance de Douala, tous les actes et décisions qui en
découlent deviennent caducs, nuls et de nul effet ramenant ainsi les porteurs
des actions dans le capital social de la société Chanas et Privat Sarl devenue
Chanas assurances S.A au même et semblable état où ils étaient avant
l’intervention de ladite ordonnance ».
Ce qui donnait judiciairement
le droit à Marie Solange Ntometane de prendre possession de l’une des plus
importantes compagnies d’assurance du Cameroun. Cette dernière a finalement été
déboutée par la même Cour suprême au motif principal de « mauvaise
interprétation » de l’arrêt du 6 juin 2019.
Procédure « sans objet »
D’après le président de
céans, la procédure engagée par dame Ntometane aux noms de Laugier et Gilot
était réputée « sans objet ». Par conséquent rejetée pour ce motif. L’arrêt de
revirement de ce 4 mai 2020 marque incontestablement la fin d’un litige à
rebondissements entre ces deux parties. Conséquence logique, Maurice Matanga,
actuel président du conseil d’administration de Chanas Assurances S.A est
conforté dans son siège. Ce dernier considère d’ailleurs Marie Solange
Ntometane comme « une inconnue qui n’est ni administrateur, ni actionnaire et
qui se prévalait d’un conseil d’administration fictif et d’une assemblée
générale frauduleuse ».
Autre conséquence
importante de cet arrêt, c’est la consolidation de l’actuel actionnariat dominé
par la Société nationale des hydrocarbures (SNH). Avant l’arrêt de la Cour
suprême du Cameroun, rappelons que Marie Solange Ntometane avait également été
déboutée par une décision rendue par la Cour commune de justice d’Abidjan.
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Un conseil
d’administration annoncé
En attendant que
l’information soit confirmée, de bonnes sources annoncent la tenue imminente
d’un conseil d’administration à Chanas assurances S.A. Tout premier de l’année
2020, il intervient au lendemain de l’arrêt de la Cour suprême en faveur de la
compagnie d’assurances, dans l’affaire qui l’a opposée depuis 2003 à Marie Solange
Ntometane. La question sera certainement évoquée lors de ce conseil
d’administration qui connaîtra d’autres temps forts : le rapport comptable et
de gestion de l’année 2019, l’évaluation de la feuille de route du directeur
général depuis son entrée en fonction en septembre 2019, la redistribution des
dividendes aux actionnaires, l’éventuelle nomination de nouveaux responsables
à divers postes, le rapport du cabinet Okalla Ahanda et Associés, commissaire
aux comptes de Chanas assurances S.A.
La situation de
l’entreprise en période de crise sanitaire du coronavirus occupera une
importante place à l’ordre du jour dudit conseil. Comme les autres compagnies
d’assurance du Cameroun, Chanas Assurances S.A. subit de plein fouet les mutations
imposées par la pandémie. Sur le plan administratif, opérationnel, mais surtout
dans la gestion des cas des assurés atteints de covid-19.
Chanas Assurances S.A
occupait la 5e position du classement des 10 compagnies d’assurance non vie au
Cameroun en 2016, selon une étude du ministère des Finances (Minfi). Pour un
chiffre d’affaires de 10,83 milliards de FCFA, avec 8,9% de parts de marché.
Avec une part de marché de 15,6% et un volume de primes de 20,4 milliards FCFA,
Axa Assurances est en tête du classement des sociétés non vie, suivie de la Société
Africaine d’Assurances et de Réassurance (18,9 milliards FCFA), Activa
Assurances (17,7 milliards FCFA) et Allianz Cameroun (13,4 milliards FCFA). A
elles seules, ces quatre compagnies représentent 53,6% du marché non vie.
Dossier Chanas S.A : 8
ans de procédure interminable
« Le ministre des finances a l’honneur
d’informer l’opinion publique que les graves évènements qui se déroulent au
sein de la société Chanas Assurances S.A. à Douala depuis quelques jours et qui
ont abouti, le lundi 25 novembre 2019, à la fermeture du siège de la société,
sont consécutifs à un contentieux entre les actionnaires de Chanas et Privat
Sarl et Chanas Assurances S.A, contentieux traité par voie judiciaire (…) Ce
conflit est de nature à mettre en péril les intérêts des assurés, sinistrés et
bénéficiaires de contrats d’assurances. Il pourrait entraîner des conséquences
systémiques fortement préjudiciables au fonctionnement du système national
d’assurance tout entier ». C’est par ce communiqué du 5 décembre 2019, que
Louis Paul Motaze, ministre des Finances, ramenait un calme provisoire au sein
de la compagnie d’assurances Chanas, fortement perturbée par un quasi bicéphalisme
à la tête de son administration.
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Les locaux de Chanas
Assurances S.A avaient en effet fait l’objet d’une attaque perpétrée le 25 novembre
2019 par Marie Solange Ntometane, se présentant comme « mandataire » de feu
Laugier qui détenait plus de 90% des actions de Chanas et Privat Sarl, par
conséquent, véritable présidente du conseil d’administration de la compagnie
d’assurance. La direction générale de Chanas Assurances S.A avait été scellée
le 25 novembre 2019, sur instructions du procureur général près la Cour d’appel
du Littoral, puis rouverte le vendredi 29 octobre 2019.
Marie Solange Ntometane a
voulu prendre possession et contrôle du siège de Chanas assurances S.A, se
fondant sur l’arrêt rendu par la Cour suprême du Cameroun, rendu le 6 juin
2019. Pour Maurice Matanga, Marie Solange Ntometane n’avait aucun mandat lui
autorisant réclamation d’un droit à Chanas Assurances S.A. « Ne faisons pas
d’amalgame Chanas et Privat Sarl n’existe plus. Il s’agit d’un acte de
banditisme, de hold up, de braquage », avait accusé le PCA.
Actionnariat
Chanas Assurances S.A est
née de la transformation en 1999 de Chanas et Privat Sarl, société d’intermédiation
d’assurances créée au Cameroun par Madame Casalegno née Jacqueline Chanas, sa
gérante statutaire. En 1973, Chanas et Privat S.A Assurances exerce ses
activités en qualité d’agent général de la première compagnie d’assurances
nationale et locale nouvellement créée, la Société camerounaise d’assurances
et de réassurance (Socar). Le 4 novembre 1999, l’Etat du Cameroun et Chanas
Assurances S.A. signent une convention de transfert du portefeuille IARDT de la
Socar avec effet au 1er janvier 2000.
Le 16 décembre, Chanas S.A
est agréée par la Commission régionale de contrôle des assurances (Crca) de la
Conférence interafricaine des marchés d’assurances (Cima). Le 24 mars 2000,
l’assureur est agréé par arrêté ministériel pour présenter et réaliser des
opérations d’assurances IARDT sur l’étendue du territoire du Cameroun. Chanas
Assurances S.A est détenue à 45,26% par la Société nationale des hydrocarbures
(Snh), 20% par dame Casalegno, et 34,74% par de petits porteurs.
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