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Cameroun-Union européenne : l’Ape entre dans sa 7e phase de démantèlement tarifaire

Cette étape est franchie sur fond de pertes énormes pour le pays, dont les produits sont de plus en plus refoulés aux portes de l’Europe. A l’inverse, les marchandises en provenance du marché européen connaissent une hausse vertigineuse.

Il n’y a pas eu de communication officielle sur la question comme par le passé, mais le processus de démantèlement tarifaire des produits éligibles aux préférences commerciales dans le cadre de la mise en œuvre de l’Accord de partenariat économique (Ape) entre le Cameroun et l’Union européenne est en principe entré dans sa 7e phase depuis le 04 août dernier. Pour cette phase, les taux de décote sur le droit de douane applicable à l’importation en provenance du marché européen sont respectivement de 100% pour les marchandises du 1er groupe, 90% pour celles du 2e groupe et 30% pour celles du 3e groupe. Ce dernier groupe concerne, entre autres produits, le matériel de BTP, les véhicules personnels, les bois, les plantes, les animaux, les pneus et jantes de véhicules et des variétés de poissons telles que le maquereau. S’il s’agit en gros d’une bonne nouvelle dans un contexte d’inflation inédite, cette étape est franchie au moment où les produits camerounais connaissent un taux de refoulement très élevé aux portes de l’Europe. Depuis avril 2022 et à la suite de l’adoption, le 14 décembre 2021 par la commission de l’Union européenne du nouveau règlement d’exécution  2021/2285 qui liste des organismes nuisibles, les interdictions et les exigences relatives à l’introduction et à la circulation dans l’Union de végétaux, produits végétaux et autres objets, le Cameroun n’est plus autorisé à faire entrer dans l’espace européen sa mangue, sa papaye, la goyave, son poivron, son aubergine, sa tomate, son orange et bien d’autres agrumes, parce qu’il n’offre pas de garantie quant aux contrôles phytosanitaire et sanitaire de ces produits.

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Les autorités camerounaises n’ont pas pu fournir les dossiers techniques exigés par les Européens, comportant les options choisies pour la gestion contre les organismes nuisibles. Le 18 avril, le ministre du Commerce (Mincommerce), Luc Magloire Mbarga Atangana, avait écrit à son partenaire pour lui indiquer que le gouvernement camerounais avait pris acte du gel des exportations des produits ci-dessus vers le marché européen, sans expliquer pourquoi les dossiers techniques n’ont pas été élaborés et transmis à temps à Bruxelles. Il avait néanmoins assuré que ses services étaient à pied d’œuvre pour élaborer les documents en question afin de faire lever ce gel. Mais, quatre mois après, le dossier est au point mort. L’Union européenne a, en effet, durci son protocole sanitaire sur les fruits et légumes après un audit effectué entre le 8 et le 18 mai 2017, qui révélait qu’un certain nombre de résidus de substances nocives avaient été trouvés dans des produits en provenance du Cameroun. Un expert du Cole-Acp révélait dans la foulée au journal Intégration, qu’entre 2015 et 2017, 159 interceptions  avait été enregistrées et notifiées aux autorités camerounaises.

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Impact mitigé

Les produits de rentes du Cameroun n’échappent pas à ce durcissement des conditions européennes. En 2020, 5 lots de 88 tonnes de café camerounais avaient été saisis, détenus puis refoulés de l’Espagne pour présence de chlorpyriphos. En février dernier, le directeur général de la Douane faisait savoir qu’ « à l’exportation, de manière générale, on peut déplorer l’impact mitigé, en raison notamment des nombreux obstacles non tarifaires érigés aux portes de l’UE qui ne permettent pas toujours le bénéfice aisé aux produits camerounais de l’admission en franchise du droit de douane». Dans une note officielle, la Douane camerounaise signale paradoxalement une baisse des exportations du Cameroun vers l’Union européenne depuis le début de la mise en œuvre de l’APE en août 2016. « Lorsque nous prenons les périodes 4 ans avant (2013-2016) et après (2017-2020) le début du démantèlement tarifaire, l’on observe une baisse globale des exportations de près de 10%. Cette baisse est liée à l’UE (-26%), car hors UE l’on observe une augmentation des exportations ». A l’inverse, les importations du Cameroun en provenance du marché européen sont largement en hausse. Entre août 2016 et août 2021, les marchandises européennes ayant bénéficié du démantèlement tarifaire dans le cadre de l’APE étaient chiffrées à plus de 600 milliards de FCFA. Dans le détail, les pertes fiscalo-douanières enregistrées par le Cameroun dans le cadre de l’APE jusqu’en 2021 sont évaluées à 25,1 milliards Fcfa (284 millions en 2016, 1,7 milliard Fcfa en 2017, 4,3 milliards Fcfa en 2018, 7,7 milliards Fcfa en 2019, 8,7 milliards Fcfa en 2020 et 2,1 milliards à fin mars 2021).

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Jean Omer Eyango

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