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Cemac : les banques pessimistes sur les perspectives à long terme

Ce sentiment découle de l’évolution de la courbe des taux sur les titres d’emprunts émis par les gouvernements de la sous-région. Les intérêts exigés par les banques sur les emprunts publics à plus d’un an de maturité sont en hausse.

Dans le document qu’il intitule « Rapport sur la politique monétaire », et dans laquelle on retrouve une analyse de la situation du marché des capitaux à la fin avril 2020, la Beac (Banque centrale de la Cemac) donne des indications qui démontrent que les banques commerciales de cette sous-région sont pessimistes sur les perspectives à long terme de son économie. En effet, on constate avec l’institution, que le coût moyen de l’argent qui est prêté aux Etats de la Cemac sur le marché des titres s’est orienté vers la hausse aussi bien pour les émissions de BTA (emprunts à moins d’un ans) que d’OTA (emprunts à plus d’un an) sur la période allant d’avril 2019) avril 2020. « Le taux moyen pondéré des émissions de BTA (bons du trésor) a gagné près de 10 points de base en passant de 4,77 % entre avril 2018 et avril 2019, à 4,87 % sur la période d’avril 2019 à avril 2020. L’augmentation des taux a été plus significative sur le segment des OTA, où le taux de rendement moyen des émissions d’obligations s’est accru d’environ 202 points de base en un an, passant de 5,01 % sur la période avril 2018-avril 2019 à 7,0 % sur la période avril 2019-avril 2020 », explique l’institution.

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Sur le marché des emprunts d’argent sur émission de titres encore appelé les marchés des capitaux, la manière dont les prêteurs allouent les ressources peut en dire long sur le sentiment qu’ils ont vis-à-vis de l’économie qu’ils servent. Lorsque les taux de rendement vont vers la hausse, c’est parce qu’ils exigent un prix plus élevés pour prêter et cela signifie en des termes simples, que le risque de donner de l’argent à celui qui le sollicite est élevé. Dans le cas de la Cemac les taux sur les emprunts à moins d’un an ont progressé, mais les taux sur les emprunts à plus d’un an ont quasiment bondit si on s’en tient aux déclarations de la BEAC. Au niveau du Cameroun, il y a une petite différence. Les banques locales sont plus sereines, sur les emprunts du gouvernement à court terme. Cela se perçoit du fait qu’elles sont prêtes à y accepter des taux d’intérêts en baisse. Mais pour ce qui est des emprunts à long terme, le Cameroun n’échappe pas à la psychose des banques. Le Taux moyen sur ses emprunts à long terme sur le marché de la BEAC est passé de 3,7% à 5, 41.

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Ce sentiment négatif des banques vis-à-vis des économies de la CEMAC concerne plus les banques camerounaises, parce qu’elles sont les investisseurs sur 57,3% des titres d’emprunts qui ont été émis par les ministères des finances des pays de la sous-région. Il y a de bonne raisons à ce sentiment négatifs. Déjà depuis 2016, les économies de la CEMAC sont dans une petite crise économique et cela s’est traduit par un retour à l’austérité budgétaire des Etats. En 2019, la situation s’est légèrement aggravé parce que les prix du pétrole, principal source des revenus d’exportations de la Cemac sont en baisse, signalant un risque de baisse des revenus pour les Etats. Enfin, l’ensemble des pays de cette sous-région ont continué d’accumuler des arriérés, et un niveau d’endettement supérieur à leurs capacités à rembourser. Depuis le début du mois de mai 2020, la BEAC a pris des mesures visant à restaurer de la sérénité. Elle s’est engagée à racheter 600 milliards de FCFA de titre de dettes détenus dans les bilans des banques. Techniquement, cela signifie que plutôt que d’avoir des papiers qui reconnaissent que les Etats leurs doivent de l’argent, les banques recevront directement cet argent-là. Mais 600 milliards cela reste assez modeste en comparaison aux 2500 milliards de FCFA d’encours de titres publics détenus par les banques. L’évolution de la courbe des taux sur les BTA et OTA permettra de savoir si la confiance se restaure.

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Le sentiment des banques à l’endroit des Etats est très important, parce qu’il fixe la référence sur laquelle s’appuient les banques pour prêter aux particuliers. Cette connexion concerne surtout les opérateurs économiques qui sont en contrat avec le gouvernement. Pour certaines opérations, ils sollicitent souvent des banques de leurs accorder un préfinancement. Si les banques ne sont pas confiantes sur les perspectives du gouvernement, elles auront tendance à exiger une prime de risque élevée sur toutes les opérations qu’elles mènent directement ou indirectement avec ce dernier. Aussi, les gouvernements de la CEMAC semblent avoir accéléré leurs demandes d’argent sur le marché des capitaux, dans un contexte où les ressources réelles des banques sont assez faibles.

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