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Climat des affaires : l’administration ne veut pas discuter fiscalité avec le Gicam

Les responsables du ministère des Finances, de la direction générale des Impôts et de la direction générale des Douanes ont répondu aux abonnés absents à la 3e édition du débat patronal organisé par le Gicam.

Ce n’est un secret pour personne que le fisc et les entreprises sont comme des chats et des souris. Au Cameroun particulièrement, les relations entre les impôts et le plus grand mouvement patronal du pays qu’est le Groupement interpatronal du Cameroun (Gicam), sont très tendues. Et pour cause : le système fiscal est jugé par le patronat comme « confiscatoire », ne permettant pas le développement des affaires au Cameroun. C’est pour être sur la même longueur d’ondes que le Gicam a organisé le 9 juillet 2021 à Yaoundé, la 3e édition du débat patronal du Gicam qui a questionné la fiscalité. « Quand on interroge les entreprises, pour 95,6% de celles-ci leur premier problème est le problème fiscal. Comment peut-on ne pas parler d’un problème qui est important pour nous », lance Célestin Tawamba pour justifier la rencontre. Avec pour objectif visé de rendre le système fiscal plus rationnel et lui permettre de contribuer au développement du pays.

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Pour édifier l’assistance présente composée des chefs d’entreprises, d’universitaires, des membres du gouvernement dont le ministre du Travail et de la sécurité sociale, Grégoire Owona et son collègue des Mines et du développement technologique, Gabriel Dodo Ndoke. Le panel était constitué d’un « keynote speaker », le Dr Ekoué Amaïzo ; de Laure Kenmogne Djoumessi, présidente de la commission fiscale, parafiscale et douanière du Gicam, d’Emmanuel Wafo Foko, promoteur et gérant de la société MIT Africa Sarl ; d’Alain Symphorien Ndzana Biloa, inspecteur principal des impôts et auteur de plusieurs ouvrages dont ‘‘Un système fiscale international 3G pour financer le développement durable’’. Le seul couac noté est l’absence des responsables de la direction générale des impôts, la direction générale des douanes et le ministère des Finances, qui selon le modérateur du jour, le journaliste de RFI Alain Foka, auraient décliné l’invitation.

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Abordant la problématique en débat, le patronat n’y est pas allé de main morte avec les multiples reproches en direction du système fiscal camerounais. Avec en priorité le système d’imposition [il est prévu ici un impôt sur les sociétés de 30% pour les PME et 33 % pour les grandes entreprises, et un précompte de 2,2% sur le chiffre d’affaires, ndlr]. « On reproche à l’administration de considérer l’impôt plus comme un instrument de développement. Comment peut-on imposer sur le chiffre d’affaires», argue Laure Kenmogne Djoumessi, avant de rajouter « une entreprise qui a par exemple un chiffre d’affaires de 100 Fcfa, pour gagner ce chiffre d’affaires, l’entreprise dépense 98 Fcfa. Ça veut dire concrètement que l’entreprise en question a gagné 2 FCfa. Dans le système de la loi fiscale actuelle, l’entreprise doit payer 33% de 2 FCFA. L’actuel système prévoit que l’entreprise en question doit payer un chiffre d’affaires minimum qui est de 2%. En conclusion, l’entreprise qui a gagné 2 Fcfa paiera 2,2% sur les 100 Fcfa ». Elle sera suivie dans cette lancée par le président du Gicam, Célestin Tawamba, pour qui l’impôt au Cameroun est confiscatoire. « Imposer sur le chiffre d’affaires et sur le bénéfice, c’est faire une fiscalité prédatrice », indique-t-il. Pour mieux édifier le parterre d’invités présents, le Gicam s’est appuyé sur l’expérience de la Côte d’Ivoire, représentée pour l’occasion sur le panel par Dominique Taty, conseil juridique et fiscal, associé PwC Côte d’Ivoire, président de la Commission Fiscale de la Cgeci. Il fait alors savoir que dans ce pays considéré comme ayant des similitudes avec le Cameroun, que la taxe sur le chiffre d’affaires est de 0,5% et plafonnée à 35 millions de Fcfa.

Dialogue

«Nous voulons aujourd’hui pouvoir définir un pacte de confiance, de performances avec notre administration. Écoutez-nous, mettons en place les mesures que nous proposons pour élargir l’assiette fiscale », confie Célestin Tawamba. Regroupant au sein de son mouvement patronal la majeure partie des grandes et moyennes entreprises, le Gicam, s’est toujours placé dans une posture de dialogue avec les autorités pour l’amélioration du système fiscal. Plusieurs actions et espaces de concertation tels que la rencontre du jour ont été organisés par le patronat dans ce sens, notamment le Cameroon business Forum, les études complémentaires dans le cadre du Livre blanc du Gicam pour l’économie camerounaise… Notons en guise d’exemple d’un point de convergence entre les deux parties malgré leur tension, l’adoption dans la loi des finances 2019 de 73% des mesures douanières proposées par le Gicam et 71% des mesures fiscales. Cette loi a été dénommée « la loi du Gicam » par certains analystes.

Les pistes pour l’amélioration du système fiscal au Cameroun

Durant les échanges sus évoqués, plusieurs propositions pouvant contribuer à améliorer le système fiscal au Cameroun ont été évoquées. L’exemple venant directement du président du (Gicam), Célestin Tawamba. « Nous n’avons pas besoin d’une fiscalité punitive. Nous avons besoin d’une fiscalité de développement qui permette non seulement aux entreprises de se développer mais aussi à l’Etat d’accroître ses recettes fiscales. Personne n’est plus soucieux du devenir de l’Etat que l’entreprise… », fait-il savoir. Il sera suivi par son Vice-président, Emmanuel de Tailly, directeur général du Groupe des Brasseries du Cameroun (Sabc). Il plaide, lui aussi, pour une fiscalité de développement, mais en plus «une politique fiscale stable, efficace et équitable ».

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Selon des données du Gicam, il y a 10 ans, 0,8% d’entreprises contribuaient pour 80% des recettes fiscales ; aujourd’hui, 0,7% d’entreprises contribuent pour 80% des recettes fiscales. Chose qui motive la proposition du directeur général du Groupe Sabc à proposer au gouvernement de « publier la liste de ceux qui payent : entreprises, secteur d’activités,… ». Un regard externe à celui du Gicam est celui de l’économiste Dieudonné Essomba, qui a intervenu en sa qualité d’ancien cadre du ministère du Plan et de l’économie du Cameroun. «Il faut revoir la gouvernance macroéconomique et bien définir le rôle de la politique fiscale et le rôle de l’entrepreneur », a-t-il indiqué.

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