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Contrôle de la fibre optique : la nouvelle offensive du groupe Orange au Cameroun

Le président directeur général d’Orange Group, Stéphane Richard, a séjourné au Cameroun la semaine dernière, officiellement pour présider la cérémonie de lancement du Orange Digital Center pour le compte de la filiale camerounaise. Mais cette visite revêtait un enjeu beaucoup plus important, discuté en très haut lieu, précisément à la présidence de la République, où le Français a été reçu dans la mi-journée du 14 octobre dernier. La problématique de la fibre optique a vraisemblablement meublé les échanges qu’il a eus avec les hautes autorités de la République.

Le président directeur général d’Orange Group a séjourné au Cameroun la semaine dernière, entre les 13 et 15 octobre 2021, pour une série d’activités avec la filiale camerounaise de l’opérateur de téléphonie mobile français. Cette visite a consacré l’inauguration vendredi dernier à Douala, du Orange Digital Center, un espace qui va favoriser la transformation digitale à travers l’arrimage des populations aux métiers du numérique. C’est du moins ce qui était officiellement consigné dans le programme de sa visite par les services de Communication d’Orange Cameroun. Mais à la vérité, il s’agissait de bien plus que l’inauguration de cet espace innovant qui constituait juste un écran de fumée sur les véritables raisons de la venue de Stéphane Richard au Cameroun.

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Il l’a d’ailleurs subrepticement reconnu, en confiant à nos confrères de Digital Business Africa le 14 octobre dernier au sortir de sa visite à Ongola FabLab qu’abrite l’Agence universitaire de la francophonie de Yaoundé. Il laissait alors entendre qu’il est venu au Cameroun pour « faire le point sur nos activités avec l’ensemble de nos équipes ici au Cameroun. Il est également prévu la rencontre des autorités publiques du pays dans la journée. L’on discutera sur la situation du secteur et sur les problématiques propres à Orange ». En effet, le Stéphane Richard a été reçu à la présidence de la République dans la mi-journée de jeudi dernier par le Secrétaire général de la Présidence de la République, Ferdinand Ngoh Ngoh, a appris EcoMatin des sources crédibles au palais de l’Unité.

Problématique de la fibre optique

Le président directeur général d’Orange Group évoque « la situation du secteur », et c’est un secret de polichinelle que de rappeler que les opérateurs privés de téléphonie mobile au Cameroun partagent les mêmes frustrations au sujet de la gestion de la fibre optique, dont le monopole est assuré par la Cameroon Telecommunications (Camtel). Orange Cameroun est sans doute le plus loquace sur cette problématique, mais il faut relever que même si les autres opérateurs n’en parlent pas avec le même décibel, il n’en demeure pas moins vrai qu’ils sont confrontés aux mêmes difficultés. Celles des désagréments générés par cette fibre optique mal installée par le chinois Huawei, le partenaire technique de Camtel.

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« Le problème au Cameroun, contrairement à la plupart des pays dans le monde, c’est que le gouvernement a décidé que seul Camtel doit avoir la fibre optique. Ça cause tous les problèmes dont nous avons aujourd’hui dans l’industrie, mais dont personne n’ose en parler. On a par exemple en moyenne deux coupures sur la fibre optique de Camtel par jour. MTN et Orange, envoyons à Camtel tous les mois, la liste des coupures qu’on a enregistrées sur leur réseau, et on leur montre l’impact que ça cause sur la qualité des services et sur plein d’autres choses », apprend-on d’une source opérant dans le secteur des télécommunications.

Souveraineté et sécurité

En clair, les opérateurs privés plaident depuis de nombreuses années pour la libéralisation de la fibre optique, Camtel ayant l’exclusivité de la pose et de la vente des capacités de la fibre optique à ces opérateurs. Orange Cameroun, MTN Cameroun, Nextell, les trois principales compagnies de téléphonie locales, veulent disposer de leur propre fibre, et assurer eux-mêmes le contrôle de leurs données. Sauf que sur cette problématique, l’Etat s’est très souvent montré frileux, arguant que la sécurité du pays se sentirait menacée s’il libéralise cet outil hautement stratégique pour lui. Une position qui contribue selon les opérateurs à retarder terriblement le développement des télécommunications au Cameroun. En dépit des actions menées jusqu’ici par les compagnies pour arracher ce monopole à Camtel, l’Etat campe sur sa position. Les hautes autorités de la République l’ont d’ailleurs réitéré au PDG d’Orange Group lors de son audience au Palais, mais en ouvrant tout de même une petite brèche sur l’éventualité de la mise en place d’une plateforme regroupant les opérateurs essentiels du secteur des télécommunications au Cameroun, pour discuter de cette problématique lancinante.

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En son temps, l’ancien ministre des Postes et Télécommunications, Bello Bouba Maïgari, croyait pouvoir trouver une solution à ce problème en décidant de la création en 2009 de Sitelcam. Cette entreprise contrôlée par l’Etat devait alors développer la fibre optique tout en permettant à tous les acteurs du secteur de prendre des participations dans son capital. « Sitelcam donnera à l’Etat le moyen de contrôler les communications internationales et donc de mieux assurer sa sécurité et sa souveraineté, ce qui est observé par ailleurs dans les pays aussi libéraux que les Etats-Unis », rêvait Bello Bouba Maïgari. Ce projet est mort-né et on n’en n’a plus jamais parlé.

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