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Douala : l’Etat récupère son domaine privé

Après le Port autonome de Douala, les ministères des Finances, des Enseignements secondaires, des Postes et Télécommunications, et celui de la Communication ont démarré, avec l'accompagnement de la communauté urbaine de Douala, une vaste campagne d'identification et de reprise de ses actifs immobiliers placés sous régime privé.

Certains y étaient installés depuis 15 ans. D’autres ont passé moins de 5 ans sur le site dénommé «TSF» dans l’arrondissement de Douala 2ème. Pourtant, ce site fait partie du domaine privé de l’Etat. Dans le sillage  du programme gouvernemental de recensement et  de récupération de son domaine privé, les occupants illégaux desdits  espaces  sont irrémédiablement installés sur une corde raide. Après les déguerpissements spectaculaires des populations effectués dans la zone Magzi de Nkomba en 2015, dans l’espace aéroportuaire en 2017, suivis de ceux de Youpwe, et dans l’aire portuaire, plusieurs autres points d’occupation illégale sont dans la ligne de mire des pouvoirs publics dans la ville de Douala.

Le 21 août 2019, plus de 800 occupants illégaux du Camp TSF ont été déguerpis lors d’une impressionnante opération dirigée par le sous-préfet de Douala 2, Didier Bidjang, accompagné des forces de l’ordre, armées. Sommées depuis plusieurs mois, ces populations ont manifestement ignoré toutes les mises en demeure adressées par les services compétents. L’espace TSF d’une superficie de 6 hectares, appartient en effet à quatre administrations: le ministère des Finances, à travers les Douanes camerounaises pour la construction de la nouvelle cité des douanes camerounaises, le ministère des Enseignements secondaires avec le projet de construction du collège d’enseignement secondaires bilingue de New-Bell, les ministères des Postes et Télécommunications par le biais de la Camtel, et celui de la Communication, pour le compte de la Cameroon Radio and Yelevision (Crtv). C’est également sur cet espace qu’ont été installés par la Communauté urbaine de Douala (Cud), quelques commerçants sinistrés du marché Congo de Douala.

«Nous savions que nous allions être déguerpis. Mais pas aussi brusquement», reconnaît Mohamed Mfouapon, un occupant du site. Pourtant, Didier Bidjang, le sous-préfet de Douala 2ème affirme le contraire: «les concernés ont été prévenus il y a un an de cette action de déguerpissement. Il y a eu jusqu’au dernier moment des réunions de concertation et de sensibilisation auprès de tous. Ces personnes connaissaient leur sort. Elles pensaient simplement que la tolérance administrative était sans limite», s’est-il exprimé. Nous apprendrons d’une victime que l’information de casser n’est parvenue que 48h avant l’opération aux concernés: «je viens de payer mon loyer, que vais-je faire maintenant», s’interroge la quinquagénaire.

Autre point d’occupation du domaine privé de l’Etat,  New-Bell, toujours dans l’arrondissement de Douala 2ème, précisément au lieu-dit Kassalafam. Cette superficie  initiale de 257 ha, ayant subi des morcellements, fait l’objet de querelles entre le ministère des Domaines du Cadastre et des Affaires Foncières (Mindcaf), la communauté urbaine de Douala (Cud) et les commerçants implantés sur ledit espace. D’après le titre foncier n° 3843 du Département du Wouri établi le 12 février 1969, ce domaine appartient incontestablement à l’Etat fédéré du Cameroun oriental depuis le 30 mars 1967. Pour le Dr. Fritz Ntone Ntone, le délégué du gouvernement auprès de la Cud, «ce terrain relève du domaine privé de l’Etat». «Faux», rapplique Konaté Abdoul Aziz, homme d’affaires opérant dans ce domaine : «il s’agit du domaine public». Par conséquent, selon lui, «la Cud est incompétente pour en connaître». Cette vive réaction de l’agent économique fait suite à l’opération coup de poing effectuée par la police municipale de la Cud dans la nuit du 20 au 21 août 2019. Kiosques, boutiques, bureaux, et même une mosquée ont été complètement détruits, sous une forte tension et résistance des occupants.

Dans une correspondance de relance du 31 juillet 2019, adressée par le Dr. Fritz Ntone Ntone à Konaté Abdoul Aziz, le délégué du gouvernement justifie qu’au-delà de la nature juridique du terrain querellé, «qui relève du domaine privé de l’Etat, il est question pour la communauté urbaine de Douala de  faire respecter la réglementation en matière d’urbanisme et d’occupation du sol…». S’appuyant sur ce que «tout propriétaire ou locataire d’un terrain est soumis à une autorisation préalable de la communauté urbaine de Douala avant tout aménagement et/ou exploitation d’un site». On estime à plus de 5000, le nombre d’immeubles sans actes d’urbanisme dans la ville de Douala. Tous, objet de litiges, autant que le domaine privé de l’Etat illégalement occupé. Les pouvoirs publics de la capitale économique annoncent l’intensification de la campagne d’identification et de consolidation du domaine privé de l’État dans tous les 6 arrondissements du Département du Wouri.

 

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