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Emplois-jeunes : bilan d’une décennie au Cameroun

Face à la montée persistante du chômage au Cameroun, les autorités ont déployé ces dernières années diverses initiatives pour stimuler l'insertion professionnelle des jeunes. Cependant, le fossé entre les attentes de la jeunesse et les résultats de ces politiques publiques s'élargit, alimentant le sentiment de désillusion.

Les projets tels que le Programme Intégré d’Appui aux Acteurs du Secteur Informel (Piaasi), le Programme d’Appui à la Jeunesse Rurale et Urbaine (Pajer-U), le Plan Triennal Spécial Jeunes (PTS-Jeunes), le Projet de valorisation, de transformation et d’industrialisation des produits agricoles (Transfagri), le Fonds de garantie aux jeunes entrepreneurs qui visaient à créer des opportunités d’emploi et à encourager l’auto-emploi semblent, pour beaucoup, s’égarer dans les méandres de la bureaucratie et des contraintes administratives.

Dans un contexte où ces programmes gouvernementaux ont souvent produit des résultats mitigés, de plus en plus de jeunes se tournent vers le numérique, perçu comme un eldorado offrant davantage d’opportunités d’emploi et de création de richesses. L’entrepreneuriat en ligne, le développement d’applications, le marketing digital deviennent des choix attractifs pour une génération en quête de solutions concrètes.  En ce jour de commémoration de la 58e Fête nationale de la jeunesse, EcoMatin examine de près ces programmes destinés aux jeunes et dresse les portraits des modèles de réussite à prendre en exemple. Dossier.

Chômage : les jeunes diplômés plus affectés que les non-scolarisés

Au Cameroun, les salons de l’emploi et de l’entrepreneuriat sont pris d’assaut par des milliers de jeunes diplômés chaque année. Problème ? Il y a peu d’offres et beaucoup de demandes. « C’est tellement difficile pour un jeune de trouver un emploi décent au Cameroun. S’il n’y a pas de travail de façon générale, le peu d’opportunités existantes sont soit mal payées soit réservées à des chanceux », déplore un jeune diplômé en Langue moderne française qui propose de partager ses connaissances dans les allées de l’Université de Yaoundé I, contre rémunération. « Il m’arrive dit-il, de faire les devoirs de certains étudiants, notamment les exposés. En retour, ces derniers me payent ».

Le nombre de chômeurs a continué de grimper au Cameroun, fin 2021. Selon la troisième enquête sur l’emploi et le secteur informel réalisée par l’Institut national de la Statistique (INS), publiée par l’INS fin octobre 2023, le taux de chômage est de 8,7% en 2021, soit une hausse de 3,0 points de pourcentage par rapport à 2010 (5,7%). Le rapport indique que la population en âge de travailler au Cameroun représente 62% de la population totale, soit un peu plus de 16 millions de personnes. Cependant, le taux d’emploi des jeunes de 15-34 ans est de 39,3%. Il est de 47,2% chez les jeunes hommes contre 31,3% chez les femmes. Il est plus élevé en milieu rural qu’en milieu urbain (43,0% contre 37,1%).

Le taux de chômage des jeunes diplômés 5 fois plus élevé

Si la situation des jeunes non-scolarisé est mauvaise, elle encore pire pour les diplômés. En effet, dans son dernier rapport d’analyse du secteur de l’éducation et de la formation au Cameroun, l’institution publique des statistiques révèle que le taux de chômage chez les jeunes camerounais âgés entre 25 et 35 ans et titulaires d’un diplôme de l’enseignement supérieur, est de 14,8% soit cinq fois celui des non-scolarisés de la même tranche d’âge, évalué à 3%. Chez ceux dont le niveau d’instruction s’est arrêté au primaire, ce taux est de 4,2% contre 7,2% pour le premier cycle de l’enseignement secondaire et 10,2% pour ceux du second cycle. En d’autres termes : plus les jeunes sont instruits, moins ils ont de chances d’être insérés dans la vie professionnelle. Paradoxal non !

Auto-emploi : les solutions qui viennent de l’informel

Au Cameroun, la problématique de l’employabilité et de l’insertion professionnelle des jeunes diplômés se pose avec acuité. L’incapacité de l’État, due à la récession économique, à offrir des emplois aux jeunes, accentuée par l’inadéquation entre formation, éducation et emploi a favorisé le foisonnement du secteur informel, ultime recours des jeunes pour la satisfaction de leur besoin socio-économique. Le secteur informel joue un rôle prépondérant dans l’économie camerounaise. Il représente une part significative de l’activité économique et de l’emploi, contribuant ainsi au développement et à la subsistance de nombreux Camerounais. Selon certaines estimations, il est un moteur économique essentiel, et contribuerait à plus de 60 % du produit intérieur brut (PIB) du pays.

Les activités informelles, telles que le commerce de rue, l’artisanat, l’agriculture informelle et les services informels, contribuent à stimuler la consommation et à répondre aux besoins de base des communautés. Steeven, 35 ans, est un déplacé interne de la région du Nord-Ouest qui exerce depuis plus de 6 ans dans la vente des objets en plastique (bassine, gobelet…). À l’aide de sa brouette, il sillonne à longueur de journée tous les coins et recoins de la capitale économique camerounaise : « Je passe mes journées comme tu vois là. J’ai une femme et quatre enfants à nourrir, sans oublier la scolarité des enfants à payer ! Donc je n’ai aucun intérêt à blaguer, » lance-t-il. L’activité nourrit son homme car dit-il qu’au-delà des charges familiales et du loyer à payer, il arrive à constituer des épargnes à travers des tontines mensuelle et hebdomadaire. « Au début, ce n’était pas facile pour moi à cause du coût de la vie extrêmement cher à Douala. Mais aujourd’hui je peux faire des recettes de 30 mille par jour et quand la marchandise finit, je pars me réapprovisionner chez mon grossiste, » souligne-t-il.

Toutefois, le secteur informel au Cameroun est confronté à plusieurs défis. Parmi lesquels, le manque d’accès aux financements formels, l’absence de réglementation, pouvant entraîner des conditions de travail précaires, une protection sociale limitée et une absence de droits du travail. Emmanuel, 41 ans, graveur : « J’ai 25 ans d’expérience dans la gravure. Aujourd’hui, plus rien n’est comme avant, même si je suis toujours passionné par ce que je fais. Les banques et microfinance refusent de nous financer, n’en parlons plus du gouvernement qui semble avoir d’autres préoccupations plus importantes. Parmi les problèmes qui affectent mon travail, c’est l’absence de ventes, » regrette-t-il. Les témoignages des Camerounais portent le sceau d’un sentiment de résignation, eux qui n’arrivent pas à s’adapter aux nouvelles exigences du marché du travail.

Concours administratifs : les jeunes dans l’étau du clientélisme et de la corruption

« La jeunesse est le fer de lance de la Nation ». Malgré le contexte marqué par la vie chère qu’imposent à la fois des contingences nationales et internationales, bon nombre de jeunes Camerounais s’efforcent d’assumer ce slogan du chef de l’État Paul Biya en suivant la voie de l’entrepreneuriat ou encore celle du mérite pour pouvoir se hisser au sommet. Cependant, tel n’est pas le cas pour d’autres qui se retrouvent très souvent dans l’étau du clientélisme et de la corruption avec pour leitmotiv d’atteindre leur but « à tout prix et à tous les prix ».

La Commission nationale anticorruption (Conac) dans son rapport 2022 comptabilise 3 472 dénonciations reçues à travers son courrier administratif. Par type d’infractions, l’on note 50 occurrences des cas de corruption en matière de concours administratifs. Bien que le pourcentage ne représente que 1,44% dans l’ensemble, ce chiffre reste tout de même important dans un contexte où le fléau diminue les chances de réussite de nombreux candidats.

Parmi les concours visés, les noms de l’École normale supérieure (ENS) ou encore celui de l’Enam reviennent très souvent dans les plaintes des usagers. « Par correspondance datée du 06 juillet 2020, Monsieur V. F. a saisi la Conac pour dénoncer l’arnaque dont il a été victime de la part de Monsieur S. M., Maire de la Commune de Bibey dans le département de la Haute Sanaga. En effet, courant 2015, Monsieur S. M. a perçu du dénonciateur la somme de 2 millions Fcfa pour faciliter son admission au concours d’entrée à l’École nationale d’administration et de Magistrature (Enam), en lui faisant croire qu’il fait partie de la famille de la première Dame. Malheureusement à la publication des résultats, le dénonciateur n’est pas admis et il s’est retourné vers Monsieur S. M. pour exiger le remboursement de son argent », relate le rapport de la Conac.

En dehors du secteur de l’administration publique, les jeunes sont également épinglés dans l’éducation. La Conac évoque par exemple le « monnayage des places lors des recrutements dans les établissements d’Enseignement secondaire publics » ou encore de la « fraude et corruption lors des examens de permis de conduire » pour ce qui est du domaine des transports.

PTS-Jeunes : 20 milliards de Fcfa de financements accordés sur 102 milliards de Fcfa annoncés

Au Cameroun, la question de l’insertion économique des jeunes reste une préoccupation constante, comme l’a reconnu le président Paul Biya lors de son discours traditionnel à la jeunesse le 10 février 2016, avant d’annoncer le plan triennal « Spécial Jeunes », censé transformer l’environnement socio-économique des jeunes. Sept ans plus tard, bien que ce programme gouvernemental soit régulièrement mentionné dans les discours politiques, son efficacité reste mitigée. En 2024, le bilan n’est pas favorable.

Selon les données du ministère de la Jeunesse et de l’éducation civique, qui pilote ce plan, de 2017 à 2022, environ 11 405 projets de jeunes ont été financés, générant 34 215 emplois directs pour un montant de financement d’environ 20 milliards de Fcfa. Toutefois, ces résultats ont été jugés insatisfaisants par les autorités, qui ont appelé à des actions plus concrètes pour améliorer le mécanisme de financement des projets des jeunes bénéficiaires de ce plan présidentiel.

Les conditions d’accès au plan triennal « Spécial Jeunes » sont alourdies par des lourdeurs administratives. Outre les critères d’éligibilité initiaux, les jeunes doivent désormais posséder une carte biométrique jeune, difficile à obtenir depuis 2018. L’Observatoire national de la Jeunesse, censé faciliter la mobilisation des jeunes dans le cadre du PTS jeune, peine à remplir ses objectifs. En 2022, seuls plus de 5000 jeunes ont bénéficié des réductions des formations professionnelles grâce à cette carte, loin des objectifs fixés.

Le PTS-Jeunes, axé sur le réarmement civique et moral, l’insertion socioprofessionnelle des jeunes et la construction des Centre Multifonctionnels de Promotion des Jeunes (CMPJ), se heurte à des obstacles sur le terrain. Au lieu de la construction des centres, des partenariats avec des instituts de formation privés sont privilégiés, comme en témoigne l’offre de 700 bourses de formation gratuite en août 2023. Le PTS-Jeunes est ainsi confronté à divers problèmes.

Piaasi : 20 542 emplois et 940 millions de Fcfa d’impôts générés en 10 ans

Parmi les instruments mis en place par le gouvernement camerounais pour accompagner et faciliter l’insertion des jeunes dans les activités liées au secteur informel, le Programme d’Appui aux acteurs du secteur informel (Piaasi) est l’une des dispositions majeures d’insertion socioprofessionnel. Sur une période de 10 ans, ce sont 20 542 emplois qui ont été créés en faveur des jeunes entre 2005 et 2015, soit 5 012 emplois directs et 15 530 emplois indirects. Près de 13 915 acteurs et 12 651 microprojets ont reçu des financements de l’Etat pour environ 4 milliards de Fcfa dans la Région de l’Extrême Nord Cameroun. Afin d’assurer un meilleur suivi des jeunes bénéficiaires de crédit, le Piaasi collabore avec 70 communes chargées de vérifier la localisation du domicile du promoteur et aussi l’exécution effective du projet de ce dernier.

Mis en œuvre en 2004 par le ministère de l’Emploi et de la Formation professionnelle, le projet a généré 940 millions de francs CFA versés par les projets financés au titre de patentes et impôts libératoires. D’après le fichier national des acteurs du secteur informel publié en 2020, 465 maîtres artisans ont été formés dans divers corps de métiers dans un rayon de couverture de 310 arrondissements sur les 360 que compte le territoire national.

De manière générale, le programme visait la création de plus de 50 000 emplois aux jeunes camerounais. Pour la période 2017 – 2019, le Piaasi s’était fixé des objectifs plus importants, notamment structurer à terme 750 microentreprises à raison de 250 par an mutées vers le secteur formel, le renforcement des capacités techniques et managériales de 5 400 promoteurs de groupes, sur une période de trois ans, soit 1 500 au cours de la première année, 1 800 la deuxième année et 2 100 la dernière. Le gouvernement avait également prévu de mettre 11 milliards de Fcfa CFA pour le financement de 5400 microprojets de groupes organisés qui devraient générer à terme, 64 800 emplois soit : 21 600 emplois directs et 43 200 emplois indirects et l’accompagnement des activités agropastorales et artisanales de 3 000 jeunes dans la région de l’Extrême-nord, 1 000 jeunes dans le Nord et 1 000 autres dans l’Adamaoua afin de contribuer à l’affaiblissement de la secte Boko Haram. Ceci dit, le bilan officiel de toutes ces actions inscrites dans le cahier de charges du Piaasi pour la période 2017-2019 demeure attendue.

PEA-jeunes : seulement 14 000 emplois générés depuis 2015

Selon un rapport récent du ministère de l’Elevage, des Pêches et des Industries Animales (Minepia), le Programme de promotion de l’entrepreneuriat agro-pastoral des jeunes (PEA-Jeunes) a contribué en huit, à la création de seulement 14 308 emplois directs et indirects. L’objectif initial était de toucher 50 400 ménages, et actuellement, 41 308 ménages ont bénéficié de ce programme.

Le PEA-Jeunes a financé des entrepreneurs âgés de 18 à 35 ans dans les secteurs agricole et pastoral, avec un financement d’un peu plus de 10 milliards de Fcfa. Il a également incubé 4500 jeunes à travers neuf cohortes, pour un montant de 2,25 milliards de Fcfa. De plus, 3577 kits d’entreprises des jeunes incubés ont été financés pour un total de 5,20 milliards de Fcfa.

Une ligne de crédit de 3,75 milliards de Fcfa a été mise en place pour le refinancement des établissements de microfinance. En outre, 1550 crédits productifs ont été octroyés aux jeunes entrepreneurs du PEA-Jeunes par les EMF pour un montant total de 1,55 milliard de Fcfa. 4155 jeunes ont également été accompagnés dans le cadre du business coaching, pour un montant de 1,66 milliard de Fcfa, afin d’assurer la viabilité de leurs entreprises.

Au total, le programme a débloqué 10,98 milliards de Fcfa, bénéficiant ainsi aux jeunes agripreneurs. Les résultats obtenus sont significatifs, avec la création de 3700 entreprises, dont 30% sont gérées par des femmes, et plus de 10 000 emplois directs et indirects créés.

Le dernier rapport affiche un taux d’exécution de 70% et de décaissement cumulé de 80%, ce qui est jugé satisfaisant par le ministre de l’Élevage. Lancé en 2015 avec une enveloppe globale de 41,9 milliards de Fcfa, le PEA-Jeunes vise à soutenir le développement d’entreprises rentables dans les filières agro-pastorales pour contribuer à l’agriculture performante, lutter contre la pauvreté rurale et améliorer la sécurité alimentaire.

Pifmas : des moyens modestes pour des résultats décevants

Le Projet d’Insertion Socio-économique des Jeunes par la création des micro-entreprises de fabrication du Matériel Sportif (Pifmas) a été officiellement lancé par le gouvernement camerounais le 1er novembre 2007. Il cible uniquement les jeunes de 18 à 35 ans, ayant quitté ou n’ayant jamais fréquenté le système scolaire, de même que les diplômés à la recherche d’un emploi. Selon les informations relayées par Financial House S.A, le partenaire financier dudit projet, son principal objectif était de promouvoir et vendre le label « Lions indomptables » à travers une marque typiquement camerounaise de matériel sportif.

Si en 17 ans, le projet porté par le ministère de la Jeunesse et de l’Education civique (Minjec) a encore du chemin à faire par rapport à ses visées, d’autres initiatives se développent toutefois sous son aile. C’est le cas du Centre multifonctionnel de Promotion des Jeunes (Cmpj). En juillet 2021, 57 nouveaux diplômés sortaient de ce centre. « Les nouveaux diplômés du centre de Douala Bassa sont ainsi rentrés en possession de leurs attestations de fin de formation et de leurs relevés de performance 2021, illustratifs de leurs compétences acquises dans le domaine de leur choix : chaudronnerie, électricité, couture, paramédical, TIC, construction, plomberie, menuiserie, mécanique automobile », relayait le journal à capitaux publics Cameroon Tribune.

Dans la même veine, en juin 2022, le Pifmas lance un appel à candidature pour le recrutement de 33 jeunes dans les domaines informatique, commerce et comptabilité. À ce jour, il n’y a pas de chiffres globaux sur l’apport du Pifmas dans l’économie camerounaise depuis 2017, mais si l’on s’en tient à l’Annuaire statistique de l’Institut national de la statistique (INS) édition 2019, le Pifmas a financé les jeunes et des coopératives en auto-emploi à hauteur de 82,2 millions de Fcfa entre 2009 et 2013 (4 ans), soit une moyenne de 21,5 millions par an. Le nombre d’apprenants, quant à lui, est passé de 2 454 en 2012 à 4 236 étudiants au Centre Multifonctionnel de Promotion des Jeunes en 2014, soit une évolution de 1 782 Cmpj en deux ans.

Transfagri : un milliard de Fcfa accordé aux PME en un an

Dans le cadre du Projet de transformation et de valorisation des produits agricoles et agroalimentaires (Transfagri), l’Agence de promotion des Petites et moyennes entreprises (Apme) a alloué 1 milliard de Fcfa aux PME en 2022. Cette somme représente un quart de l’enveloppe totale de 4 milliards de Fcfa annoncée pour cette année-là. La seconde composante du Transfagri, lancée en octobre 2022, vise l’industrialisation des produits agricoles dans les régions du Littoral, de l’Ouest, du Centre et de l’Adamaoua. L’objectif est de donner une impulsion opérationnelle à ce projet.

Sur les 4 milliards de Fcfa prévus pour 2023 afin de développer de nouveaux produits et services financiers pour les PME agricoles et agroalimentaires des zones couvertes par le Transfagri, seuls 1,63 milliard de Fcfa ont été débloqués jusqu’à présent. Ces fonds ont été alloués à 22 Etablissements de microfinance (EMF) porteurs de projets innovants, notamment dans les domaines du Warrantage, de l’agriculture contractuelle, etc.

Rappelons que le projet Transfagri est issu de la coopération entre le Cameroun et la France, dans le cadre du 3e Contrat de désendettement et de développement (C2D). Doté d’un financement de 17,710 milliards de Fcfa, il vise à dynamiser les secteurs agricoles et agroalimentaires en développant un écosystème de services bénéfique aux acteurs économiques locaux, notamment les PME, les GIC et les coopératives. Les filières ciblées incluent les céréales, la pisciculture, le palmier à huile, l’ananas et l’aviculture.

Numérique : une niche d’emplois pour les jeunes inventeurs

En matière d’innovation numérique, le Cameroun regorge de talents créatifs. Ces dernières années ont été marquées par une prolifération impressionnante de projets novateurs dans divers secteurs tels que la santé, l’agriculture, l’e-commerce, la finance et l’éducation. Des applications et entreprises numériques émergent et prospèrent. Le pays peut se vanter de quelques réussites notables, comme le jeu camerounais Kiro’o Games d’Olivier Madiba, qui a été adapté en film à Hollywood. De même, l’application Gifted Mom d’Alain Nteff, la plateforme de recherche d’emplois Njorku de Churchill Mambé, disponible dans plus de 15 pays africains… sont autant d’histoires à succès qui témoignent du dynamisme de l’écosystème numérique camerounais.

Les politiques publiques en faveur des jeunes

Le gouvernement camerounais a en effet déployé un ambitieux plan d’action visant à stimuler l’innovation dans le secteur des technologies de l’information et de la communication (TIC) et à offrir des opportunités aux jeunes entrepreneurs. Objectif : dynamiser l’économie, créer des emplois, développer le commerce et l’éducation en ligne. Dans le cadre de cette initiative, plusieurs programmes ont été lancés pour soutenir et promouvoir l’entrepreneuriat numérique en tant que source majeure d’emplois pour la jeunesse.

L’un des plus phares, c’est la « Semaine de l’Innovation Numérique ». Placée sous le patronage du président Paul Biya, ce programme émerge comme une plateforme fructueuse pour détecter, primer et accompagner les meilleures innovations numériques avec entre autres activité phare, le concours national du meilleur projet d’innovation numérique qui récompense chaque année, les trois projets les plus prometteurs par des enveloppes allant de 10,5 à 15 millions de Fcfa, et offre aussi des sessions d’incubation dans de grands hubs internationaux.

Stimuler l’innovation chez les jeunes

Pour sa part, le Centre de développement de l’économie numérique (Cdic) est devenu un acteur clé dans la révolution numérique au Cameroun. Offrant un cadre propice à l’innovation, le Cdic soutient les jeunes porteurs de projets TIC en mettant à leur disposition des outils technologiques, un encadrement technique, et une assistance managériale. Son objectif sur cinq ans est d’accompagner au moins 1 000 projets d’entreprises/startups, créant ainsi des emplois directs et indirects.

Le gouvernement a également investi massivement dans l’infrastructure des TIC, étendant le réseau dorsal national en fibre optique, augmentant la capacité des points d’échange internet, et déployant des réseaux de téléphonie mobile 3G et 4G. Et aussi : deux data center situés à la Campost, offrant des services d’hébergement des données ; une connectivité à l’internationale diversifiée, d’une capacité de près de 3Tbits avec 4 points d’atterrissement des câbles sous-marins construits et fonctionnels.

Arthur Zang : l’inventeur qui fait battre le cœur de l’Afrique

A seulement 36 ans, ce jeune chercheur camerounais a marqué l’histoire des soins cardiaques dans les pays en développement en inventant le Cardiopad, une tablette tactile médicale révolutionnaire permettant des examens cardiaques à distance.

Tout est partie d’une une vidéo publiée en 2014 sur YouTube, décrivant le concept et le fonctionnement de son invention, le CardioPad, une tablette tactile médicale permettant aux populations n’ayant pas accès à des centres de soins de passer un examen cardiaque à distance. Le jeune inventeur, 26 ans à l’époque ne se doutait de rien, mais sa vidéo a vite fait le tour des réseaux sociaux. «Elle a été regardée plus de 30 000 fois en un week-end», se souvient-il. La vidéo devient virale, attirant l’attention des médias et même du chef de l’Etat camerounais. Paul Biya lui accorde un financement de 20 millions de francs CFA. Cet appui lui permet de fabriquer les premiers prototypes en Chine. Pour ce pionnier, c’était le début d’une carrière exceptionnelle.

Les récompenses affluent rapidement. En 2014, il remporte le «Prix Rolex de l’esprit d’entreprise». Forbes le classe parmi les jeunes les plus influents du monde, et il est honoré au «Prix 2015 de l’innovation pour l’Afrique». En juin 2019, son CardioPad est salué comme la «Meilleure Invention en Afrique» par le magazine Time.

Malgré ces succès, Zang ne s’arrête pas. En 2020, il conçoit l’Oxynet, un système intelligent de production d’oxygène médical. Face à la pandémie de Covid-19, cette innovation devient cruciale. Les stations d’oxygène médical connectées d’Oxynet produisent continuellement une concentration d’oxygène à 95 %, contribuant ainsi à l’amélioration des soins médicaux, notamment dans un contexte de pénurie d’équipements respiratoires. Le dispositif fonctionne grâce au courant électrique, et est également muni d’un circuit d’alimentation par énergie solaire et d’une batterie. Selon le concepteur, la station peut fournir de l’oxygène à plus de 10 patients de manière simultanée, et a une capacité de production de 60 litres d’oxygène par minute. Chaque station a la particularité de pouvoir être contrôlée à distance à partir d’une application.

Arthur Zang ne se contente pas d’innover technologiquement. Il souligne Pour lui, être chercheur est un métier à plein temps et la recherche est un pilier essentiel du développement du continent. Avec des inventions qui sauvent des vies et son plaidoyer en faveur de l’innovation et de la recherche, Zang incarne l’espoir d’un avenir meilleur pour l’Afrique, un avenir où la créativité et la technologie contribuent à relever les défis de la santé et à promouvoir le développement durable.

Bertrand Foffe : l’ingénieur qui transforme l’agriculture grâce à l’innovation numérique

Diplômé de la Fontys University of Applied Sciences en TIC en 2012, il est le fondateur de Jangolo Farm, un concept innovant qui regroupe une ferme agricole et d’élevage ainsi qu’une plateforme web dédiée à la vente des produits agricoles et manufacturés « made in Cameroon ».

Bertrand Foffe est un jeune entrepreneur camerounais diplômé de la Fontys University of Applied Sciences en TIC en 2012. L’ingénieur en informatique vivant au Pays-Bas depuis plus de 15 ans a travaillé pour des géants tels que Philips et Accenture avant de fonder en 2016, Jangolo Farm. Il s’agit d’un concept innovant qui regroupe une ferme agricole et d’élevage ainsi qu’une plateforme web dédiée à la vente des produits agricoles et manufacturés « made in Cameroon ». L’objectif étant de réduire les pertes post-récoltes des producteurs locaux et d’améliorer leurs recettes. Sur les motivations de la création de cette start-up basée à Douala, Bertrand Foffe affirme que : « Notre rêve était d’avoir le plus grand impact possible sur l’économie camerounaise. » Un rêve en voie de se réaliser, car à date, cette plateforme revendique environ 100 000 utilisateurs et 30 000 entreprises enregistrées.

À travers cet écosystème digital, Jangolo révolutionne la dimension du commerce virtuel au Cameroun en apportant une solution facile, celle de permettre aux populations d’acheter des produits agricoles directement chez les exploitants. Jangolo emploie aujourd’hui près de 50 employés et connecte les acteurs des chaînes de valeurs agrobusiness en facilitant l’accès à l’information et au marché pour les producteurs locaux. « Aujourd’hui, nous avons trouvé un business model idéal pour notre activité et avons développé des solutions pour pouvoir accompagner tous les acteurs de la chaîne. Dans la filière poulet par exemple, nous avons un impact réel sur environ 700 éleveurs et en 6 mois, nous avons réalisé un chiffre d’affaires de 48 millions de Fcfa dans ce domaine, » explique-t-il.

Depuis le début de l’aventure, Jangolo a déjà placé 500 000 € et durant les six mois de formation dont elle vient de bénéficier d’Orange Fap, l’accélérateur des start-ups, l’entreprise a bénéficié d’un accompagnement de 5 millions de Fcfa. Elle prépare également une levée de fonds de près de 350 millions de F auprès des partenaires financiers sur 2 ans. À court et moyen terme, Bertrand Foffe projette d’établir son champ d’action 1 million d’utilisateurs d’ici la fin de l’année 2024.

Jean Lobé Lobé : fondateur de Waspito, une solution numérique

Le jeune inventeur bouscule les normes en proposant des solutions e-santé accessibles en quelques clics, offrant ainsi un accès aux soins simplifié.

Dans un milieu économiquement hostile comme celui du Cameroun, Jean Lobé Lobé rend l’impossible possible à travers des solutions numériques. Avec sa startup basée à Douala, le Camerounais a réussi à mettre sur pied en 2020 une solution e-santé pour accéder aux soins en quelques clics alors que le covid-19 prenait corps. La plateforme dispose d’une application, disponible sur Play Store et App Store, où les utilisateurs peuvent retrouver, en plus de médecins de diverses spécialités, une base de données de pharmacies et de laboratoires médicaux. Le visionnaire Jean Lobé Lobé est actuellement président-directeur général et fondateur de Waspito.

Jean Lobé Lobé est un entrepreneur camerounais également connu pour son travail dans le domaine de la santé mentale et pour son engagement à promouvoir une médecine de proximité, moins protocolaire, capable de redonner à l’homme toute sa dignité. Avant de fonder Waspito, il a travaillé dans des entreprises telles que British American Tobacco et Camair-Co. Il est diplômé en comptabilité appliquée de l’Université Oxford Brooks.

En plus de Waspito, Jean Lobé Lobé a fondé Hepting Holdings Ltd, une entreprise spécialisée dans la gestion des portefeuilles électroniques. Elle est basée à Surrey, en Colombie-Britannique, au Canada.

D’après Forbes Afrique, le fondateur et dirigeant de la healthtech camerounaise Waspito a procédé à une levée de fonds de 2,7 millions de dollars pour développer sa base d’utilisateurs sur son marché domestique et étendre ses services à la Côte d’Ivoire. C’est l’un des rares jeunes Camerounais à avoir bénéficié d’un tel financement des investisseurs étrangers.

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