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Experts comptables : conflits larvés entre membres de l’Ordre

Sur instructions du Conseil de l'ordre, la Commission de discipline et de déontologie de l'Ordre national des experts comptables du Cameroun (Onecca) vient d'engager une procédure disciplinaire et une action en recouvrement contre René Libong, ancien Président de cette institution, et Roger Tchokogue, ancien vice-Président. Les deux experts comptables indexés devront chacun répondre de leurs "actes perpétrés pour nuire à l'image et à la réputation de la profession toute entière", ainsi que verser respectivement 210.651.586 FCFA et 450.000 FCFA pour "le supposé préjudice financier subi par l'Onecca". Les accusés parlent de "cabale, acharnement et manipulation".

« Abus de confiance« . « Bureau irrégulier« . « Irrespect des décisions de justice » etc….ce sont quelques graves récriminations faites à l’endroit de l’actuel Bureau de l’Ordre national des experts comptables  du Cameroun (Onecca). Preuve du climat malsain qui règne en son sein. Une récente sortie fracassante de  deux membres de cet auguste regroupement des génies de la comptabilité confirment un grand malaise en son sein. Les experts comptables René Libong et Roger Tchokogue ont en effet saisi le Tribunal de grande instance  du Wouri contre leur convocation devant le Conseil de discipline et de déontologie de l’Onecca, le 20 novembre 2018. Après dire droit, la juridiction de grande instance ordonnera par deux ordonnances, n°936 et 937, la « transmission des pièces et autres documents valant voies de recours et procédures diverses, à la Chambre d’appel de la Commission de discipline de l’ordre« , juridiction interne compétente pour connaître des oppositions ou récusations des procédures engagées contre ses membres.

La saisine du Tgi du Wouri par René Libong et Roger Tchokogue succède à de précédentes actions formulées contre leur traduction qu’ils jugent « illégales et complotée« , devant le Conseil de discipline de l’Onecca. Successivement, la saisine en référé du Tribunal de première instance de Douala-Bonanjo par Roger Tchokogue, qui obtiendra la suspension de l’Assemblée générale du 29 avril 2016, par ordonnance du 28 avril 2016. L’interdiction par Jean Marc Ekoa Mbarga, le sous-Préfet de Douala 1er d’alors, informé à temps, de la tenue d’une réunion secrète et de diversion entre Marcel Dobill, le président de l’Assemblée générale de l’Onecca et certains experts comptables. Le rejet des défenses à exécution engagées par Leonard Ambassa, actuel président de l’Ordre, contre le jugement du Tribunal de première instance de Douala-Bonanjo. L’accord des défenses à exécution en faveur de Marcel Dobill par arrêt de la Cour d’appel du Littoral. L’intervention du Secrétaire général du Ministère de l’administration territoriale pour la tenue de cette Assemblée générale, finalement décidée pour le 9 mai 2016, en méconnaissance de la décision du juge des référés rendue le 29 avril 2016. La nouvelle assignation en nullité de René Libong et Roger Tchokogue contre l’Ag du 9 mai 2016 devant le Tribunal de première instance de Douala.

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Récusation

Malgré cette succession de décisions défavorables, et les litiges pendants devant le Tgi de Douala-Bonanjo, l’Assemblée générale se tiendra. Sanctionnée par la mise sur pied d’un bureau de l’Onecca présidé par Leonard Ambassa. Pour René Libong et Roger Tchokogue, « il est clair que Léonard Ambassa, membre du bureau de l’Onecca sortant, et autres, sont illégalement installés à la tête de l’Onecca à ce jour. Il s’agit d’un hold-up savamment créé par Marcel Dobill« . Les premiers actes de ce bureau seront d’ailleurs sans appel. René Libong et Roger Tchokogue seront convoqués le 21 octobre 2017 devant le Conseil de discipline de l’Onecca pour la session du 29 novembre suivant. Convocation suivie d’une récusation formulées par les convoqués devant la Chambre d’appel du Conseil de discipline de l’Ordre et d’une lettre de protestation adressée aux membres du Conseil de discipline de l’Ordre, le 28 décembre 2017. Démarches vaines puisque René Libong et Roger Tchokogue seront sévèrement sanctionnés. « c’est un acharnement contre nous. Ceux qui ont agi l’ont fait pour se  procurer des avantages aux membres du bureau en place en même temps qu’ils ont porté atteinte aux  intérêts des requérants« . Les deux experts comptables malheureux porteront de nouveau plainte contre  les membres du conseil de discipline de l’Onecca pour « abus de fonction« .

Alors que les procédures d’appel et d’opposition sont pendantes, René Libong et Roger Tchokogue seront de se chef convoqués, le 31 octobre 2018 par la Commission de discipline et de déontologie de l’Onecca, qui prétexte « un quitus de poursuite reçu de l’Assemblée générale » de cette institution. « Fallacieux prétexte« , crient encore René Libong et Roger Tchokogue. Ces derniers, après avoir effectués une énième récusation, étaient appelés à comparaître sur deux points d’achoppement précis : « initier une procédure disciplinaire contre les requérants pour les voir répondre des actes qu’ils ont perpétrés pour nuire à l’image et à la réputation de la profession toute entière« , et « initier une action en recouvrement contre les requérants pour le supposé préjudice financier subi par l’Onecca dont les montants s’élèveraient à 210.651.586 FCFA pour René Libong et 450.000 FCFA pour Roger Tchokogue« . Après renvoi de la convocation du 31 octobre 2018, les experts comptables incriminés se feront servir une autre convocation à comparaître lors d’une séance disciplinaire du 20 novembre 2018. Roger Tchokogue et René Libong saisiront encore le Tribunal de grande instance du Wouri qui rendra deux ordonnances n°936 et 937, en faveur d’un examen des cas litigieux par la Chambre d’appel de la Commission de discipline et de déontologie de l’Onecca.

A titre de rappel, l’affaire René Libong et Roger Tchokogue contre la Commission de discipline de l’ordre de l’Onecca tire ses sources du 26 février 2016, date prévue pour la tenue de l’Assemblée générale (Ag) de l’Onecca. Ladite Ag portait d’après l’ordre du jour dressé préalablement conformément aux dispositions légales, sur « le renouvellement des organes dirigeants de l’Ordre« . Coup de théâtre, Marcel Dobill, le Président de l’Assemblée générale fera introduire de façon inattendue, le point d’ordre sur  » la disqualification de certains candidats » au futur conseil de l’Ordre en gestation à cette époque. Ce, en violation flagrante des dispositions de l’article 11 de l’arrêté n°000001201 Minfi du 18 juillet 2012 portant approbation du Règlement intérieur de l’Ordre national des experts comptables du Cameroun, qui stipule en son alinéa 1, « l’Assemblée générale ne peut délibérer que sur les questions portées à l’ordre du jour et figurant dans la convocation de session« . En son alinéa 2, l’article 11 de l’Arrêté de Minfi de 2012 cité supra dispose clairement que  » les membres de l’ordre et la tutelle peuvent faire inscrire des sujets dans l’ordre du jour de l’Assemblée générale. A cet effet, ils sont tenus de les présenter au Président de l’ordre au moins un mois avant la date prévue de l’Assemblée générale « . L’alinéa 3 prévoit :  » l’ordre du jour de toute session de l’Assemblée générale est communiqué à la tutelle au moins quinze (15) jours avant la date prévue de l’Assemblée générale par le président du Conseil de l’Ordre.

Ainsi rendu à cette étape de ce rocambolesque contentieux, les deux experts comptables s’interrogent sur « la régularité de l’Assemblée générale du 29 avril 2016, sur la régularité de celle du 9 mai 2016, sur la bravade par le Conseil de discipline des différentes demandes de récusation formulées, sur la crédibilité, la légitimité et la légalité de la Commission de discipline et de déontologie« . René Libong et Roger Tchokogue semblent pourtant avoir une idée de l’origine de ce qu’ils qualifient de « cabale »: la volonté de René Libong, ancien Président de l’Ordre, de faire respecter les exigences de la Fédération internationale des experts comptables (Ifac), soit 120 heures de formation en 3 ans pour les membres de l’Onecca d’une part, 40 heures minimum d’autre part, compte tenu de ce que la retraite n’est pas obligatoire dans le métier d’expert-comptable. « Cette exigence n’était, semble-t-il, pas du goût de certains membres en l’occurrence les Past Présidents« , qui trouvaient en cela, non seulement une gêne, mais surtout, ils estimaient que la jeune génération n’avait pas grand-chose à leur apprendre et étaient à se faire former ou recycler ». Des règlements de compte donc entre l’ancien exécutif présidé par René Libong et certains puissants caciques experts comptables. Le Bureau de l’Onecca semble pourtant décidé à mener à terme le processus de sanction de ses deux membres.

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