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Flux financiers illicites: l’Anif sur les traces de 124 milliards de FCFA

D’après le rapport sur l’état de la lutte contre la corruption au Cameroun en 2020, l’Agence nationale d’investigation financière a reçu 785 déclarations de soupçon souscrites par les professions assujetties, en hausse de 23,62% par rapport à 2019. Les flux financiers suspects affichent une augmentation de 53,78% par rapport à l'année précédente.

“La peur du gendarme est le début de la sagesse”, dit un adage. Manifestement cette sagesse tarde à pénétrer le corps social au Cameroun si l’on en juge par la propension des voleurs en col blanc. Dans le rapport sur l’état de la lutte contre la corruption au Cameroun en 2020 publié le 23 septembre 2021, la Commission nationale anti-corruption (Conac) révèle que le pays a été le théâtre d’opérations de blanchiment de capitaux pour un montant de plus de 124 milliards de FCFA contre 57,4 milliards en 2019.

On apprend qu’en 2020, l’Agence nationale d’investigation financière (Anif) a reçu 785 déclarations d’opérations suspectes (DOS) souscrites par les professions assujetties, contre 635 en 2019 (+23,62%). Ces déclarations de soupçons ont donné lieu à 232 rapports disséminés aux juridictions et autres autorités compétentes pour des flux financiers repérés de 124,197 milliards de FCFA. Les Tribunaux de grande instance du Wouri (20,26%) et du Mfoundi (7,33%), le Tribunal militaire de Yaoundé (3%) et le Tribunal criminel spécial (2,59%) sont les Juridictions les plus saisies des dossiers de l’Anif.

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Les flux financiers suspects repérés se répartissent entre les infractions de fraudes diverses (87,183 milliards), le détournement de deniers publics (34,674 milliards), la corruption (758,807 millions), le financement du terrorisme (686 millions), l’escroquerie (567,22 millions), le scamming c’est-à-dire la fraude sur internet (45,708 millions), le faux et usage de faux (282 millions) et les trafics divers (non renseigné).

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Les analystes de l’Anif soulignent quelques constats, notamment une explosion des cas de fraudes diverses qui sont passées de 67 cas en 2019 à 146 cas du fait notamment de l’utilisation abusive de cartes bancaires; les dossiers liés aux soupçons du financement du terrorisme (y compris les financements des activités et des groupes sécessionnistes) restent importants (27 cas); les dossiers se rapportant aux détournements de deniers publics découlent principalement des détournements des fonds publics dans les marchés publics, de la prise illégale d’intérêt dans un acte et de la concussion; le scamming est aussi en hausse, de 5 à 12 dossiers entre 2019 et 2020. En outre, on relève une nette augmentation de 53,78% du montant global des flux financiers repérés par rapport à 2019. “Cette augmentation s’explique principalement par l’explosion des fraudes diverses qui passent de 58,888 à 87,183 milliards de FCFA. Cette évolution se justifie par les montants identifiés de blanchiment de fraudes fiscales et douanières”, explique-t-on du côté de l’Anif.

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Risque élevé

Depuis le lancement de ses activités en 2006, l’Anif a reçu 5361 déclarations de soupçons issues principalement des banques 91,31%, des établissements de microfinance (4,76%), les sociétés de transfert de fonds (2,26%) et les autorités de poursuites (0,52%). Ces dossiers ont donné lieu à 1203 dossiers qui ont fait l’objet de saisine des juridictions et autres autorités compétentes pour des flux financiers de 1734 milliards de FCFA. Les principales infractions sous-jacentes et flux financiers repérés étant les trafics divers: 87 cas pour 663,3 milliards où par dossier transmis il est observé un flux financier moyen de 7,6 milliards de FCFA; les détournements de deniers publics: 161 cas et 478,769 milliards dont le flux financiers moyen est de 2,9 milliards de FCFA; les fraudes diverses: 285 cas et 365 milliards avec un flux financier moyen de 1,2 milliard de FCFA; le financement du terrorisme: 171 cas et 93,73 milliards avec un flux financier moyen de 548 millions de FCFA et faux et usage de faux: 106 cas et 79,631 milliards avec un flux financier moyen de 751 millions de FCFA.

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La première évaluation nationale de risques de blanchiment des capitaux et de financement du terrorisme effectuée en 2018 instruite à l’Anif par le ministre des Finances en 2018 a établi que “les risques de blanchiment d’argent au Cameroun ont été évalués à un niveau «Elevé».

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