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Gicam-Ecam : André Siaka dévoile ses réserves sur le projet de fusion

Taiseux de notoriété publique, André Siaka a la parole rare. Mais, extraordinairement, au cours d’une rencontre fortuite, celui qui a été pendant 26 ans (1988-2014) directeur général, puis administrateur directeur général de ce qui était alors la Société anonyme des brasseries du Cameroun (Sabc) a spontanément accepté de s’exprimer sur l’actualité brûlante au sein du Groupement inter-patronal du Cameroun (Gicam), dont il a présidé aux destinées entre 1993 et 2008 (15 ans). En exclusivité ici les grandes ligne de cet interview-vérité à paraître dans l'édition d'EcoMatin de ce lundi 29 mai 2023.

Réputé peu disert et très discret, André Siaka a exceptionnellement accordé une interview exclusive à Ecomatin. Au-delà de l’emballement médiatique sur l’actualité relative au projet de fusion entre les groupes patronaux Gicam (Groupement interpatronal du Cameroun), et Ecam (Entreprises du Cameroun), l’ancien patron des patrons du Cameroun a abondé sur ce sujet brûlant qui divise. Si l’ancien Directeur général de la Société anonyme des brasseries du Cameroun (Sabc) relève que le rapprochement Gicam-Ecam a été unanimement saluée par la classe économique dans son ensemble, il émet, sur la forme, d’importantes réserves sur le processus qui a conduit à la signature, le 5 avril 2023, d’un traité de fusion entre le Gicam et Ecam, l’opportunité de cette démarche, et propose des pistes de solutions pour une sortie de crise. Ce d’autant plus que depuis la signature du traité de fusion, la décision de dissoudre le Gicam ne fait pas l’unanimité au sein de la première organisation patronale du Cameroun.

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Concrètement, l’homme d’affaires est par exemple favorable à la présentation aux instances décisionnelles du Gicam d’un  « projet de traité de fusion», au lieu d’un traité n’ayant reçu l’aval ni du Conseil d’administration, ni de l’Assemblée générale, et  qui ne cadre pas avec les intérêts du Gicam. « L’éthique professionnelle est une garantie de transparence à l’égard du grand public et de la communauté à laquelle on appartient. Cette démarche morale incarne des valeurs que le Gicam a de tout temps, non seulement prônées, mais également appliquées. A cet effet, et compte tenu des différentes étapes du processus d’une fusion entre le Gicam et Ecam, la cérémonie du 5 avril 2023 m’a semblé questionnable au moins sur deux aspects : Premièrement, par respect pour les adhérents, il aurait été plus honnête et juste de parler d’un « Projet de traité de fusion », point de départ d’un processus codifié. En second lieu, le parterre et la stature des personnalités conviées à la cérémonie du « Traité de fusion », notamment le gouverneur de la région du Littoral, le représentant de l’OIT (Organisation internationale du travail), un conseiller spécial du Premier ministre, laissent croire que la fusion est déjà actée et que le reste du processus n’est que simple formalité. J’ai peur qu’il ne puisse s’avérer un jour que ces personnalités ont été abusées, la charrue ayant été mise avant les bœufs. Ce qui serait vraiment dommage. », soutient André Siaka, avant de s’interroger : « Comme vous le savez, le Gicam a parfois pris des positions, dont certaines très incisives, sur des questions d’intérêt national. De quoi aurions-nous l’air si nous étions pris en flagrant délit de ce que nous reprochons aux autres? ».

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Ce dernier mentionne également les manquements stratégiques des porteurs du projet de fusion, décrié tant sur le plan éthique que de la gouvernance.  Avec emphase, André Siaka se pose des questions fondamentales sur cette initiative qui privilégie la création d’une nouvelle organisation patronale dite « unifiée », impliquant la dissolution du Gicam, au détriment d’un secteur privé fédéré autour d’une « Maison commune » qu’est le Gicam, comme indiqué lors de son investiture par l’actuel président du Gicam, Célestin Tawamba. « Virage à 180° ou oubli? », s’interroge André Siaka. Par ailleurs, il ressort l’amalgame entre le rôle et les pouvoirs du Conseil d’administration, l’Assemblée générale du Gicam et son Comité des sages. Et précise que dans le cas d’espèce,  « ni le président, ni le Conseil d’administration n’ont compétence pour poser un tel acte ( dissolution du Gicam) qui relève du pouvoir exclusif de l’Assemblée générale extraordinaire des membres, après consultation pour avis de conformité du Comité des sages ».  

Sur l’opportunité d’une fusion-création entre le Gicam et Ecam, André Siaka pense expressément que le traité du 5 avril 2023 entérine « un bond en arrière de plusieurs décennies pour le Gicam ». Ce, au regard du déséquilibre patrimoniale et organisationnnel entre les deux mouvements patronaux: «…En matière de patrimoine, le Gicam dispose d’actifs et d’un immeuble situé en plein cœur de Bonanjo pouvant être valorisé à plusieurs milliards de F CFA. Après 15 ans d’existence, peu de personnes peuvent aujourd’hui indiquer où se trouve le siège social de ECam. Dans le domaine de la gouvernance, l’expérience d’Ecam, loin de pouvoir constituer un acquis, est loin d’être exemplaire, pour ne pas dire plus.  Sa dernière Assemblée générale, par exemple, remonterait au 25 février 2021″. Et d’ajouter : « les membres du Gicam sont en droit de se demander ce qu’apportera concrètement au groupement le mouvement Ecam pris comme organisation ».

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Fort de tout ce qui précède, révèle André Siaka, le Comité des sages du Gicam, au cours de ses dernières assises, a suggéré au président Tawamba  « de surseoir à la poursuite de cette opération de fusion, jusqu’à ce que les conditions de forme et de fond soient réunies, et cela dans le sens des meilleurs intérêts de notre organisation ».  « ….Compte tenu de mon attachement historique à cette organisation, j’invite donc les porteurs du projet de fusion, ceux du Gicam comme ceux d’Ecam, à revenir à la raison afin d’éviter de jeter le discrédit sur le patronat camerounais », conseille André Siaka dans cet interview fleuve à retrouver dans l’édition d’EcoMatin de ce lundi 29 mai, sur son site internet et les réseaux sociaux affiliés.

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