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Paul Biya veut remettre CBC à la famille Fotso

Le Chef de l’Etat a marqué sa préférence pour un retour du groupe Fotso dans l’actionnariat de la banque. Reste à savoir qui représentera au sein des organes sociaux de cet établissement de crédit.

S’agit-il d’un énième acte de fidélité envers celui qui était présenté dans la presse comme son « ami intime »? C’en a tout l’air ! Après le décès de leur père, la descendance de Fotso Victor pourrait bien prendre le gouvernail de la Commercial Bank-Cameroun(CBC). L’ex banque d’Yves Michel Fotso, est aujourd’hui au cœur d’une opération de cession des parts de l’Etat (98%) détenus dans le capital. Selon une source de EcoMatin à la présidence de la République, le Chef de l’Etat a marqué sa préférence pour un retour du groupe Fotso dans l’actionnariat de la banque. Celui-ci devrait acquérir la majorité des parts conformément aux modalités cession qu’il a lui-même indiquées au ministre des finances. Celles-ci prévoient que 51% des parts soient revendus à un partenaire de référence, 30% placés à la Bourse des valeurs mobilières d’Afrique Centrale (Bvmac) basée à Douala, et l’Etat du Cameroun ne conserverait que 17%. Les 2% restants appartiennent à la compagnie d’assurance Allianz Cameroun. S’agissant des parts majoritaires, le Directeur Général, Léandre Djummo précise que celles-ci seront vendues à un actionnaire recruté après une procédure d’appel à manifestation d’intérêt. Un choix défini d’avance violerait donc ipso facto cette procédure que l’Etat a lui-même déterminée.

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Si les désidératas de Paul Biya sont exécutés à la lettre, la descendance du feu Fotso Victor redeviendrait propriétaire de cette banque. Reste à savoir qui en serait bénéficiaire. Avant la mise sous séquestre de ses actions en 2013, Yves Michel Fotso y détenait plus de la moitié du capital (via Capital Financial Holdings Luxembourg, 46,57 % ; Fotso Group Holdings, 2,14 % ; et Dawney Holding, 5 %). Mais aujourd’hui, l’homme d’affaires qui a été évacué pour des raisons sanitaires depuis 2019 alors qu’il était en prison depuis 2010 n’est pas prêt de revenir au Cameroun. L’ancien patron de la compagnie aérienne Camair, avait été condamné à la prison à perpétuité pour le détournement de près de 50 millions d’euros. Il avait également écopé d’une condamnation à 25 ans de prison dans une autre affaire de corruption.

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Entre ses frères, c’est des divisions larvées. L’empire Fotso affiche des fissures depuis le décès de son fondateur. Des guerres de leadership battent leur plein entre les administrateurs, l’héritier et les 25 veuves du milliardaire de Bandjoun. Mais selon toute vraisemblance, Laure Njitap Toukam Fotso(47 ans) devenue ainsi l’administrateur principal des biens depuis le décès de son père, est en pôle position. Elle est par ailleurs la vice-présidente d’un groupe familial comptant actuellement une vingtaine d’entreprises réparties dans dix pays du continent. Joint par téléphone, l’un des administrateurs refuse de se prononcer sur la question.

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Plus de 61 milliards à débourser

Placée sous administration provisoire entre 2009 et 2016, CBC avait été sauvée de justesse par l’Etat du Cameroun, qui en est devenu le principal actionnaire. Forte de ce nouveau souffle, la banque camerounaise affiche aujourd’hui une situation des plus enviables. En 2020, elle a réalisé des bénéfices de 3,604 milliards de FCFA en hausse de 30% comparée aux 2,5 milliards de 2019. Une belle performance pour un établissement de crédit qui, il y’a 12 ans, était au bord de la liquidation. C’est sans doute au vu de cette santé financière que la banque attire la convoitise des investisseurs. Mais si la famille Fotso en devenait le propriétaire, il faudra débourser gros. En attendant la capitalisation officielle de CBC, les experts estiment ces parts à plus de 60 voire 70 milliards de FCFA. « Compte tenu de sa situation financière actuelle, le cours d’une action à la banque comme CBC ne pourrait valoir moins de 10.000 FCFA. Avec un capital de 12 milliards, la banque pourrait ainsi répartir les 12 000 actions comme il plaît à l’actionnaire majoritaire. En faisant le calcul on est à 61 milliards au bas mot pour acquérir les parts de références (51%). Mais ça ne reste qu’une simulation et je pense qu’elle vaut bien plus. Maintenant, rien ne dit que l’Etat ne va s’accorder avec le cessionnaire que vous mentionnez pour un mode de paiement plus flexible » commente un analyste financier.

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En 2009, quand la CBC fut mise sous administration provisoire, l’établissement accusait un déficit en fonds propres de 60 milliards de F CFA. Au moment de la reconstitution du Capital et après que l’Etat ait décidé de placer sous séquestre les titres des actionnaires Yves Michel Fotso n’avait souscrit que pour une seule action de 10 000 F CFA manifestant ainsi son désaccord vis-à-vis de cette opération. Il était pourtant attendu un apport de 2,4 milliards de FCFA au terme de la première séance de souscription en vue de porter le capital à 12 milliards de F CFA et ainsi, boucler le tour de table. Le fils de Fotso Victor ne décolère pas d’avoir été « dépossédé de ses droits » via la mise sous séquestre de ses actions.

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