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Port de kribi : Révélations sur les manigances de Necotrans

Le logisticien français a usé de tous les moyens pour s’arroger la totalité des pouvoirs dans le groupement Necotrans/ Kpmo, fragiliser le consortium camerounais, et se servir du port en eau profonde de Kribi comme pourvoyeur de fonds avec pour objectif, sauver sa filiale camerounaise mori- bonde.

C’est finalement ce 18 janvier 2018 que Louis Paul Motaze, le ministre de l’économie, du plan et de l’aménagement du territoire, président du Comité de pilotage et de suivi de la réalisation du Complexe industriel-portuaire de Kribi, a acté l’annulation de la procédure ayant conduit au recrutement du Groupement Necotrans/Kpmo, en vue de l’exploitation et la maintenance du terminal polyvalent du port en eau profonde de Kribi. Un jour seulement après le communiqué du Premier Ministre constatant «la défaillance» du groupement Necotrans/Kpmo. Tout part du 26 août 2015. Philémon Yang, le Premier Ministre annonce l’exploitation du terminal polyvalent de Kribi par le groupement Necotrans/Kpmo. Necotrans, ancien Getma, séduit le gouvernement camerounais pour «sa longue expérience dans la logistique et la maintenance portuaire». Quant à Kpmo (Kribi Port Multi-Operators), c’est un consortium de 9 entreprises camerounaises composé de Transimex, Apm, Sapem, 2M, 3 T Cameroun, Camtransit, Copem et Star & Gos, toutes spécialisées dans la maintenance et l’exploitation des terminaux. Mais les rapports entre les deux partenaires vont très vite virer à la méfiance. Kpmo crève l’abcès des divergences avec Necotrans.

Diviser pour mieux régner

D’abord sur le «statut juridique de la Kpmo». « Necotrans opère un revirement à 180° sur ce point capital en totale contradiction avec le processus ayant abouti à la décision d’adjudication matérialisée par le communiqué du Premier ministre officialisant le nom de l’exploitant du terminal polyvalent de Kribi «, disait Gabriel Manimben, le Directeur général d’APM.

En clair, l’adjudicataire du Terminal polyvalent du port en eau profonde de Kribi (Tpk) est constitué d’un groupement à deux têtes et à deux personnes morales, Necotrans (51%) et Kpmo (49%). Ainsi, tous les actes et divers documents, notamment les procès-verbaux sanctionnant l’évolution des négociations entre le partenaire privé et le partenaire public, ont été signés par les représentants des deux parties et non par les 10 entreprises membres du groupement Necotrans/Kpmo. «Necotrans ne voulait plus traiter avec la personne morale Kpmo. Il souhaitait négocier directement avec les différents membres qui constituent ce groupement pour mieux les contrôler et disloquer leur force unitaire. Cette évolution stratégique hégémonique a été rejetée par Kpmo qui a pris conscience du danger qui planait sur leurs têtes «, constate Gabriel Manimben.

 

Batailles pour le contrôle des postes

Ensuite sur «la gouvernance rotative au sein de la société de projet Tpk». L’accord de groupement d’entreprises signé en 2013 entre Necotrans et Kpmo avait en effet jeté les bases d’une collaboration saine entre ces deux partenaires, seuls actionnaires de la société de projet Tpk. L’accord de groupement prévoyait expressément les modalités de gestion et de gouvernance rotative dans les principaux postes de direction de l’entreprise : à savoir ceux de Président du conseil d’administration, de Directeur général, Directeur général adjoint, Directeur administratif et financier, Contrôleur financier, Directeur de l’exploitation et Directeur technique. La rotation conformément à l’accord, devait s’effectuer tous les 5 ans. « Non seulement Necotrans manifestait des velléités de contrôle absolu des différents postes de direction, mais envisageait éliminer de l’organigramme les postes stratégiques destinés à la partie camerounaise, à savoir le Dga et le Contrôleur de gestion, puisqu’il s’était arrogé les postes de Dg et Daf», réagi de nouveau Kpmo.

Contrat de concession exclusif

Enfin, sur «le Pacte d’actionnaire». Dernier verrou vers la signature d’un contrat de concession, ce document a également empoisonné l’évolution du processus d’exploitation du port en eau profonde de Kribi. Kpmo y voyait, une fois de plus, un mauvais jeu de son partenaire: « l’objectif de Necotrans était d’imposer un pacte d’actionnaire à son avantage exclusif, lui permettant de contrôler totalement la société Tpk. Ce qui semblait inacceptable pour Kpmo car l’adjudicataire du terminal polyvalent du port de Kribi est le groupement Necotrans/Kpmo. Ses deux membres doivent être les deux actionnaires de la société Tpk avec des droits quasiment équivalents. Necotrans n’aurait pas probablement obtenu la concession sans la présence de Kpmo et sa dimension locale», s’insurge-t-on du côté de Kpmo. Le logisticien français aura donc usé de tous les subterfuges pour se tailler la part du lion de la concession, en non-conformité avec le contrat de partenariat signé avec son partenaire camerounais. Ces pratiques douteuses visaient certainement à remettre sur pied la filiale camerounaise de Necotrans qui battait de l’aile financièrement. Coup de théâtre, alors que la pression de l’État du Cameroun avait fait accélérer le processus d’exploitation du port en eau profonde de Kribi et de son terminal, juin 2017, Necotrans demande et obtient la liquidation judiciaire partielle de ses actifs en France et en Afrique dont le Cameroun. Le 25 août 2017, le tribunal de commerce de Paris rend son verdict. Une correspondance du 11 juillet 2017, du secrétaire général de la Présidence de la République au Premier ministre prescrit au gouvernement de «constater la carence du Groupement Necotrans/Kpmo». Mais aussi, de « proposer, par la suite, des solutions alternatives pour un démarrage rapide des activités sur le terminal polyvalent du port en eau profonde de Kribi «. Ce sera finalement R-logistic, une entreprise française spécialisée dans le secteur d’activité des auxiliaires des transports par eau, dans la logistique et la gestion des terminaux, qui succédera à Necotrans. Ses responsables, dont Fabrice Viguier, le directeur général ont d’ailleurs séjourné au Cameroun décembre 2017. Plusieurs défis en attente: rétablir la confiance entre les actionnaires de la société d’économie TPK, rouvrir les discussions avec ses futurs associés camerounais dont Kpmo, nommer un nouveau président du conseil d’administration etc….

D’un coût de 207,270 milliards FCFA, le port en eau profonde de Kribi, dont l’inauguration est par ailleurs attendue depuis plus d’un an, a été réalisé par la China Harbour Engeneering Company (CHEC), sur la base d’un accord de prêt conclu entre le Cameroun et Eximbank of China, et dispose d’un tirant d’eau de 15 mètres et d’un accès direct à la mer prévu pour accueillir de grands navires transportant jusqu’à 8000 conteneurs.

Après une première phase d’exploitation de 5 ans, et avec une activité estimée à 1,4 million de tonnes de fret annuel dès la 2ème année, une seconde phase de 15 ans prévoit la mise à disposition d’un quai adjacent de 350 mètres, mais aussi d’installations et équipements complémentaires pour une activité supérieure à 3 millions de tonnes annuels.

Dans cette 2ème phase, les travaux de construction de terminaux aluminium, hydrocarbures, gaz naturel liquéfié ainsi que d’un appontement minéralier pour le fer de 24 mètres de tirant d’eau, seront financés par des opérateurs économiques et industriels et selon le schéma «Built Operate Transfer» (BOT).

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