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Secteur bancaire : les intérêts des déposants mieux protégés

Une étude de la Ferdi sur les accords de coopération monétaire montre que la croissance serait plus en zone franc que dans le reste de l’Afrique subsaharienne.

Les déposants du système bancaire des Etats de la Cemac peuvent avoir le cœur tranquille : la Commission bancaire de l’Afrique Centrale (Cobac) veille sur leurs intérêts. En 2019, le régulateur du secteur bancaire a engagé une application stricte du règlement Cobac R-2016/03 relatif aux fonds propres nets des établissements de crédit. Inspiré des standards internationaux de Bâle II et Bâle III, ce Règlement induit une éligibilité plus sélective des instruments de fonds propres. Ce qui s’est traduit, au niveau du secteur bancaire de la Cemac, par un recul plus marqué du volume global des fonds propres nets. Ceux-ci sont passés de 1 122 milliards de Fcfa fin 2018 à 739 milliards fin 2019.

Selon un rapport de la Cobac, si le ratio de couverture des risques par les fonds propres de l’ensemble du secteur atteignait 20,6% fin 2019, au-dessus de l’exigence réglementaire de 10,5% (exigences incluant le volant de conservation en fonds propres de 2,5%), seules 14 banques présentaient des fonds propres nets suffisants pour respecter l’ensemble des ratios prudentiels, certaines affichant même des fonds propres négatifs.

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L’entrée en vigueur des nouvelles normes de fonds propres s’est faite dans la mouvance de la mise en œuvre du plan de supervision triennal 2019-2021 du Secrétariat général de la Cobac. Ce plan vise à instaurer un dispositif de supervision sur base consolidée, fondé sur les risques et bénéficiant d’un reporting renforcé. La Cobac a par ailleurs adopté, en 2019, de nouveaux règlements relatifs à son régime de sanctions et à la supervision des établissements de paiement. Elle a, en outre, assuré le suivi des stratégies de réduction des stocks de créances en souffrance transmises par les établissements de crédit.

Standards internationaux

Dans le cadre de sa revue des politiques communes de la Cemac (décembre 2019), le FMI a salué cette initiative et recommandé de la compléter par une analyse des créances en souffrance liées aux engagements des États; une revue des pratiques de restructuration et l’examen de l’opportunité d’une opération ponctuelle de nettoyage des bilans bancaires.

D’une manière générale, les activités de crédit se sont inscrites à la baisse en 2019 hormis au Tchad (+ 5,7%) et au Cameroun (+ 0,3%). Les encours de crédits bruts sont en recul de 4,6 % par rapport à 2018, pour atteindre 8442 milliards. A la Beac, l’on explique que le recul des encours reflète globalement l’attitude prudente d’un secteur bancaire au bilan fragilisé et le faible dynamisme du secteur privé, face à des perspectives macroéconomiques qui demeurent incertaines. Les analystes soulignent aussi que la qualité dégradée des portefeuilles de crédit demeure un handicap pour le secteur bancaire. Avec un stock de 1783 milliards de Fcfa, les créances brutes en souffrance (créances impayées, créances immobilisées et créances douteuses) représentaient, fin 2019, 21,1 % des créances brutes (après 21,2% fin 2018), selon les chiffres de la Beac.

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Trésorerie confortable

L’année 2019 a marqué à cet égard une stabilisation des encours et du taux de créances en souffrance, qui étaient en hausse soutenue et ininterrompue depuis 2014. Le poids des créances brutes en souffrance dans les portefeuilles de crédit apparaît particulièrement élevé dans les secteurs bancaires équatoguinéen (49,5 %), congolais (28,1 %) et tchadien (26,3 %). Le niveau agrégé des provisions est resté stable, à 993 milliards, faisant reculer le taux net de créances en souffrance de 11,1 à 10,6%.L’excédent global de trésorerie du secteur bancaire a connu une nouvelle hausse, pour s’établir à 3 702 milliards fin 2019 (+ 4,6 % par rapport à fin 2018). Cette hausse s’explique par la progression des emplois (4 929 milliards, + 16,7 %), combinée à la stabilité des ressources de trésorerie (1227 milliards, – 0,1%). La Banque de France note que les banque de la Cemac présentent ainsi, globalement, une situation de trésorerie confortable : le rapport de liquidité agrégé du secteur s’établissait à 157,7 % fin 2019, et seuls cinq établissements présentaient alors un rapport de liquidité en deçà de la norme réglementaire de 100% (ils étaient six fin 2018 et onze fin 2017).

En 2019, le secteur bancaire de la Cemac a affiché un résultat net de 144 milliards, en léger recul (–2,4%) par rapport à 2018. Le résultat brut d’exploitation s’est replié de 6,6%, en lien notamment avec le resserrement de l’activité de crédit, pesant sur le niveau du produit net bancaire (PNB) – ce dernier affichant un recul de 2,4%.

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Institutions financière : gouvernance rénovée pour accroitre le financement de l’économie

L’année 2019 a été marquée par la fusion effective des deux bourses de valeurs de la Cemac, le Douala Stock Exchange (DSX) et la Bourse des valeurs mobilières de l’Afrique centrale (Bvmac). La nouvelle bourse de valeurs compte un dépositaire central unique, la Beac (également banque de règlement) et un régulateur unique, la Commission de surveillance du marché financier de l’Afrique centrale (Cosumaf). Actée lors de la réunion des chefs d’État de la Cemac à N’Djamena, en octobre 2017, cette fusion vise à dynamiser les marchés financiers de la Cemac et à stimuler le financement de l’économie.

Sur ce marché de la Cemac, deux émissions obligataires ont été réalisées en 2019, pour un montant total de 128 milliards de Fcfa. Ces émissions ont été réalisées par la Société africaine forestière et agricole du Cameroun (Safacam), pour 2 milliards, et par l’État gabonais, pour 126 milliards (montant initial de 100 milliards, sursouscrit de 26%). Elles font suite à une année 2018 blanche sur le marché primaire, ce dernier ayant été suspendu en préparation de la fusion du DSX et de la Bvmac. L’encours total de la dette sur le marché secondaire s’élevait, fin 2019, à 689 milliards (–14% par rapport à janvier de la même année), composé à 87% d’obligations souveraines. Plus de 4 millions de titres ont été échangés en 2019, pour une valeur totale de 29,4 milliards, soit un montant de transactions très faible. La capitalisation boursière a reculé de 2% en 2019 pour s’établir à 148 milliards.

Des mesures d’accompagnement ont été adoptées par les chefs d’État de la Cemac afin de favoriser le développement du nouveau marché financier. Déjà, la Cosumaf a pris en 2019 plusieurs initiatives afin de promouvoir le marché financier : mise en place d’une plateforme permanente d’échange avec les acteurs de la Place, création d’une association professionnelle des sociétés de bourse à l’échelle sous-régionale et refonte de son site Internet.

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Bien-être des populations

Outre le marché financier, la banque de développement des Etats de l’Afrique centrale (Bdeac) s’attèle à jouer pleinement son rôle d’acteur majeur dans le financement des économies de la sous-région. L’action de la Bdeac est renforcée par l’achèvement de certaines réformes de gouvernance, notamment la mise en place d’un comité d’audit. Des avancées saluées par le FMI.En 2019, la Banque a financé 14 opérations, pour un montant total de 243,6 milliards de Fcfa. Des projets dont la réalisation contribue au bien-être de population de la Cemac, comme le montre le Rapport d’activités présenté par le président, Fortunato Ofa Mbo Nchama, au cours de l’assemblée générale de la Bdeac tenue le 20 avril 2019 à Malabo. De son exposé sur l’évaluation de l’impact des opérations de la banque sur la population de la sous-région, il ressort que les projets instruits par la Banque en 2017-2019 ont contribué à créer environ 95 000 emplois pendant la phase de mise en œuvre, dont 38 000 emplois directs et 57 000 emplois indirects.

Ce faisant, des salaires globaux de 340 milliards de Fcfa qui ont été versés aux travailleurs pendant cette période. En phase d’exploitation, ce sont au total 18 000 emplois (directs, indirects et induits) qui ont été créés, générant des salaires globaux annuels de 43,2 milliards de Fcfa. Ces interventions impacteront directement sur 113 000 familles, soit un échantillon de 678 000 personnes, ce qui représente 1,4% de la population totale de la zone Cemac. En outre, soutient Fortunato Ofa Mbo Nchama, les financements apportés par la Bdeac contribueront au bitumage de 1300 km routes dans les zones actuellement difficiles d’accès, permettant ainsi le désenclavement d’une population estimée à près de 2 800 000 habitants, soit 5,6% de toute la population de la zone Cemac.

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En dehors des impacts socio-économiques, les interventions de la Banque soutiennent directement une centaine d’entreprises dans le cadre de leurs investissements, leur permettant ainsi de mieux se développer et d’augmenter leurs rentabilités financières et opérationnelles. Par effet de levier dans le cadre de cofinancements, les financements apportés par la Banque ont contribué à drainer près de 1500 milliards de Fcfa dans la zone Cemac, soit 3,8% du PIB de toute la zone en 2018.

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