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Sécurité sociale : une autre CNPS en gestation

La Caisse Nationale des Personnels de l’Etat fera l’objet d’une étude actuarielle pour évaluer sa viabilité économique et financière. Cette initiative ambitieuse vise à repenser la gestion des pensions des fonctionnaires et contractuels de l'État. Cependant, la perspective d'une telle réforme suscite des réactions mitigées, notamment au sein du ministère des Finances.

Le 30 novembre dernier, le Premier ministre Joseph Dion Ngute a dévoilé une proposition majeure lors de son discours de présentation du Programme économique, financier, social et culturel du gouvernement pour l’exercice 2024. Il s’agit de la mise en place d’une Caisse Nationale des Personnels de l’État (CNPE). Un projet qui vise à réformer la gestion des pensions des fonctionnaires et autres contractuels de l’Etat, apportant ainsi des changements significatifs à la sécurité sociale du pays.

La première étape de cette initiative réside dans la réalisation d’une étude actuarielle de faisabilité. Selon les experts, cette étape cruciale implique l’analyse complète des données financières, des tendances démographiques et d’autres facteurs pertinents pour évaluer la viabilité financière de la CNPE. «Il s’agit de déterminer les coûts futurs, les besoins en financement et d’évaluer la soutenabilité du projet en fonction du nombre de fonctionnaires et contractuels, de leur masse salariale, et de leur capacité à cotiser», explique un gestionnaire d’actifs installé à Douala.

Cependant, l’annonce de la création d’une Caisse Nationale des Personnels de l’Etat suscite à la fois l’enthousiasme et l’appréhension, notamment au sein du ministère des Finances, où la Direction de la dépense de personnels et des pensions joue déjà un rôle central dans la gestion des pensions. Le gouvernement consacre d’énormes sommes pour tenir ses engagements dans ce domaine. Evalués à 216,1 milliards de F en 2019, ces fonds continuent de progresser, passant à 224,2 milliards en 2022, puis 259,2 milliards en 2023 et enfin à 269,6 milliards pour l’exercice 2024.

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Avantages de la CNPE

Interrogés sur les avantages potentiels de la CNPE, les experts soulignent que si l’étude actuarielle qui va être faite démontre qu’elle peut être viable et que l’Etat peut s’engager à mettre ces pensions qu’il paie chaque mois à sa disposition, elle aura la capacité de fructifier cet argent comme le fait la CNPS qui elle, dispose des réserves en termes de centaines de milliards. Bien plus, la CNPE pourra, à terme, devenir un acteur important du financement de l’économie nationale. «C’est une décision de gestion qui à mon avis mérite d’être saluée, argue un gestionnaire d’actifs. Il faut simplement lui donner autant de moyens qu’à la CNPS : une autonomie de gestion, un statut spécial qui lui permet de pouvoir gérer de manière libre les pensions des personnels et contractuels de l’Etat».

Il n’est donc pas exclu que la CNPE devienne à terme comme le Public Investment Corporation (PIC), le fonds de pension gérant les retraites des fonctionnaires sud-africains, qui dispose de participations dans les plus grands groupes du pays de Nelson Mandela, à l’instar du groupe de telecom MTN ou de Tiger Brands, maison mère de Chococam. En plus d’être, le gestionnaire des fonds de pension le plus important de l’Afrique investit tous azimuts sur le continent. L’année dernière, il a déboursé 100 millions de dollars pour entrer dans Africa Finance Corporation (AFC), l’un des principaux véhicules de financement des infrastructures.

Risques et défis majeurs

La mise en œuvre de la Caisse Nationale des Personnels de l’État (CNPE) au Cameroun est en effet appelée à se heurter à plusieurs défis et risques cruciaux. Le financement insuffisant représente une menace majeure, avec le risque potentiel de déficit si les cotisations ne parviennent pas à couvrir les coûts des prestations. «Des mécanismes flexibles seront nécessaires pour ajuster les taux de cotisation en fonction des besoins», argumente un gestionnaire d’actifs réputé. Selon cet expert, les évolutions démographiques peuvent également engendrer des déséquilibres financiers, nécessitant des politiques adaptatives pour faire face aux variations de la population.

Ce n’est pas tout : «la gestion des investissements constitue également un défi, exigeant une politique prudente pour garantir des rendements durables, tout en minimisant les risques liés à la volatilité des marchés financiers, poursuit l’expert. Les pressions politiques représentent un autre obstacle potentiel, avec le risque d’interférence politique dans la gestion quotidienne de la caisse». Ainsi, une gouvernance indépendante et transparente est essentielle pour atténuer ces différents risques.

Avec l’avènement de la CNPE, prévue dans la Stratégie nationale de développement à l’horizon 2030 (SND 30), le Cameroun complète son écosystème (CNPS, Caisse des dépôts et consignations) public nécessaire pour mobiliser l’épargne longue dont il a tant besoin pour contribuer au financement de ses infrastructures.

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