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Serges Hervé Boyogueno : « la collecte de l’or pour le compte de l’Etat a augmenté de 93% en 2021 »

Le Directeur général de la Sonamines, bras opérationnel, de conseil et de gestion des intérêts de l’Etat dans le secteur minier dresse le bilan des 12 premiers mois de cette structure créée par le président de la république.

C’est le 14 décembre 2020 que la SONAMINES a été créée par le président de la République Paul Biya. Un an après, où en est-on avec le déploiement de la structure ?

Créée par n°2020/749 du 14 décembre 2020, la Société Nationale des Mines en abrégé Sonamines, a été investie de cette exaltante mission de bras opérationnel, de conseil et de gestion des intérêts de l’Etat dans le secteur minier.

A ce titre, a pour principale mission, « De développer et de promouvoir le secteur minier au Cameroun, à l’exception des hydrocarbures et des substances des carrières, et de gérer les intérêts de l’Etat dans ce domaine ».

C’est une société à part entière avec une personnalité juridique et une autonomie financière, qui a la possibilité d’entrer en exploitation comme toutes les sociétés minières, ou de faire de la recherche. Des actions sont d’ores et déjà engagées dans ce sens, avec plusieurs demandes de permis de reconnaissance et de recherche déposées au niveau du Ministère des Mines, dans le cadre de différents projets qu’elle envisage de réaliser.

Il faut dire qu’après la mise en place de ses organes dirigeants le 16 avril 2021 notamment l’Assemblée Générale, le Conseil d’Administration et la Direction Générale, elle est entrée inexorablement dans la phase de son opérationnalisation. A date, c’est une société bien installée avec des locaux, et dotée de tous les éléments d’identification possible d’une entreprise. En vue d’assurer progressivement un maillage territorial efficace des sites miniers actifs, onze Bureaux de la Sonamines ont été créés dans les régions de l’Adamaoua, de l’Est, du Nord et du Sud. A ce jour, elle a tenue deux (Assemblées Générales) et quatre (04) Conseils d’Administration.

Sur le plan opérationnel, depuis le 17 juillet 2021, la Sonamines a repris la collecte de l’impôt synthétique minier libératoire dans différents sites miniers, le suivi et le contrôle de la production de l’or dont les chiffres sont d’ailleurs à la hausse. J’en veux pour preuve la collecte du 17 juillet au 30 novembre 2021, de 43, 46 KG d’or en augmentation de 93%,29 % sur la même période en 2020 et 138, 86 % sur la même période en 2019. La Canalisation de cette substance précieuse, devra quant à elle débuter dans les prochains jours. A ce sujet et en vue d’optimiser cette activité, la Sonamines envisage d’encourager la création par les artisans des coopératives et soutenir celles qui existent déjà, dans l’optique d’un accompagnement maximal en termes de renforcement des capacités et d’appuis divers pour augmenter la production qui sera rachetée par la suite.

Elle a également participé à la négociation de trois conventions minières, et apporté une touche particulière avec le partage de production dans le secteur de la mine solide et qui est déjà en cours dans le secteur de la mine liquide pour maximiser les revenus de l’État. Il s’agit en effet ici, de récupérer les parts de l’Etat dès la première production sortie d’usine, c’est d’ailleurs plus avantageux pour l’Etat qui peut disposer de ses parts dès l’entame de la production au lieu d’attendre des années encore.

Vous avez engagé en septembre 2021 une réflexion sur les sources de financement de la Sonamines. Où en êtes-vous ?

Comme vous le savez certainement la Sonamines a un capital social de 10 milliards de FCFA. Cette seule ressource est insuffisante pour impulser le développement de l’entreprise et lui permettre de répondre efficacement aux attentes placées en elle. C’est dans cette optique que nous avons entrepris la maturation des projets en gestation, dont la mise en œuvre permettrait à moyen terme de garantir son autonomie financière. Certains sont déjà bien avancés. C’est ce qui justifie d’ailleurs la demande de quatre permis de carrières et deux permis de recherche auprès de notre tutelle technique.

Vous avez tenu au mois d’octobre des concertations avec les collecteurs, responsables des unités de fusion et de bureaux d’achats des secteurs or et diamant, dans les régions de l’Est et de l’Adamaoua, avec pour objectif d’assoir les bases d’une saine collaboration entre ces différents acteurs du secteur minier et la Sonamines. Comment se dessine cette collaboration?

Nous avons été heureux et surpris en même temps ; surpris par la réceptivité des titulaires de bureaux d’achats et de cartes de collecteur. Nous avions pensé la tâche plus difficile mais les opérateurs sur le terrain ont été réceptifs. Vous savez que l’Etat dans le cadre de la collecte de l’impôt synthétique prélève 25% sur l’exploitation ; il est question pour nous de discuter avec les exploitants de semi mécanisés pour qu’ils nous revendent tout ou une partie des 75% avec lesquels les opérateurs restent lorsque l’Etat a prélevé sa part.

Au-delà de cette réceptivité, est-ce qu’il n’a pas des difficultés que la Sonamines rencontre sur le terrain ?

Les difficultés sont légions sur le terrain. Je vous donne un exemple ; nous avons un collaborateur qui a passé une nuit en cellule sur le terrain parce qu’il collectait les impôts pour le compte de l’Etat. Avec les titulaires de bureau d’achat c’est facile, mais avec les opérateurs de semi-mécanisé, la tâche est beaucoup plus difficile et généralement la difficulté se situe au niveau de la déclaration de production. Ce que nous disons c’est que chaque opérateur doit payer exactement ce qui correspond à ce qu’il a exploité sans la moindre tolérance.

Restons sur le terrain pour signaler que le travail des enfants a été interdit dans les sites miniers. Mais selon les informations en notre possession, les enfants sont toujours présents dans ces sites d’exploitation. Comment comptez-vous à votre niveau œuvrer pour l’application stricte de cette mesure ?

En effet, cela nous tient particulièrement à cœur. C’est une activité qui écorne l’image de notre pays à l’extérieur. Nous avons vu plusieurs reportages à ce sujet sur des chaînes de télévision étrangères qui démontrent à suffisance l’ampleur de ce phénomène et ses conséquences. Notre action a consisté pour cette année à travers la phase pilote de « l’opération zéro enfant dans la mine », impulsée par la Sonamines, à faire des dons en manuels scolaires à 153 enfants de l’école publique de Kambélé 3 et doter 6 établissements scolaires de la même zone en paquets minimums, appuis au fonctionnement et primes des maitres des parents. Nous avons déjà commencé à discuter avec des coopératives qui se sont formées. Nous allons mettre les exploitants en coopératives et encourager celles qui existent déjà. Lorsque tous les exploitants seront dans des coopératives, nous allons accentuer la sensibilisation afin que les parents s’engagent davantage à ne plus envoyer les enfants dans les sites miniers. Maintenant, nous savons que ces enfants constituent pour eux une main d’œuvre. Pour la compenser, nous allons appuyer les parents en matériels de production et d’exploitation pour minimiser la pénibilité de leur labeur. Ce qui contribuera d’ailleurs à augmenter leur production qui sera rachetée par la Sonamines. C’est une activité qui n’est pas facile en réalité mais nous sommes résolument déterminés à la mener. Nous faisons le suivi auprès de ces établissements scolaires qui nous ont parlé de quelques cas de désertions et surtout des difficultés infrastructurelles qu’elles rencontrent. Nous poursuivons la sensibilisation et en fonction de nos moyens nous allons multiplier des actions dans ce sens.

La question de la fermeture des trous miniers après exploitation est également un véritable casse-tête. Quelles stratégies adopteriez-vous pour contraindre les entreprises à fermer les trous afin d’éviter les décès récurrents ?

Cela fait partie de l’une des tâches les plus difficiles qui nous attend sur le terrain. Il faut tout de même préciser qu’il n’est pas facile de mettre la main sur les exploitants qui utilisent des engins et qui sèment des dégâts sur l’environnement pour la simple raison que ces exploitants utilisent des autorisations d’exploitation artisanale attribuées aux personnes physiques de nationalité camerounaise. Il est donc question de distinguer les activités. Les artisans miniers se consacreront uniquement aux activités d’exploitation artisanale au sens strict. Ceux qui font dans la semi-mécanisée se constitueront en sociétés, comme le prévoit le Code minier. Cela est très bien règlementé dans le texte suscité à travers le Fonds de restauration, de réhabilitation et de fermeture des sites miniers et de carrières. Les exploitants devront réaliser des études d’impact environnemental assortis de plan de restauration et verser dans un compte séquestre dédié à cet effet, le montant correspondant  la réhabilitation. A la fin de l’exploitation, si le site a été réhabilité par l’exploitant, celui-ci sera remboursé. Sinon,  la Sonamines utilisera cet argent pour le faire, conformément aux dispositions de l’article 4 de son décret de création. La difficulté réelle se trouvera au niveau des sites dits orphelins. Il faut bien que quelqu’un restaure ce qui a été fait. Nous commencerons par les recenser, puis nous mettrons sur pied un cahier de charges et nous trouverons des voies et moyens pour restaurer ces sites.

Vous avez récemment lancé un appel à manifestation d’intérêt en vue de la préparation d’un plan stratégique de la structure que vous dirigez. Quels objectifs voulez-vous atteindre à travers ce plan ?

Effectivement nous avons engagé des actions visant à doter la Sonamines d’un plan stratégique à court, moyen et long terme, devant lui permettre de mener à bien ses missions et d’atteindre les objectifs assignés par l’Etat sur le plan socio-économique. De façon spécifique, il s’agira entre autres, de réaliser le diagnostic stratégique et organisationnel de développement de la
Sonamines et de son secteur d’activités en tenant compte des ODD et autres documents stratégiques nationaux  notamment la SND30, de formuler une vision claire du développement de la Sonamines, de définir ses valeurs, d’identifier les orientations et les axes stratégiques, de proposer une stratégie de mobilisation de partenaires et des moyens/ressources pour sa mise en œuvre, d’élaborer le cadr de performance du plan stratégique de développement de la Sonamines.

Quels sont les objectifs de la Sonamines pour l’année 2022 qui pointe à l’horizon ?

Nous avons 4 objectifs majeurs prioritaires et vitaux pour l’année qui s’annonce. Premièrement la Sonamines doit entrer en exploitation en 2022 que ce soit pour les substances de carrière ou les substances comme l’or et le diamant. Ensuite, nous avons la poursuite de la collecte de l’impôt synthétique et les opérations de canalisation d’or et de diamant. Puis, nous avons la maturation des projets. Nous avons des projets industriels, miniers et commerciaux dont la maturation doit être bouclée en 2022. Enfin, nous allons passer à l’offensive dans la recherche des partenariats stratégiques pour pouvoir implémenter les projets que nous allons maturer et ceux pour lesquels nous avons déjà sollicité des permis de recherche auprès de la tutelle technique.

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