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Tensions politiques, hausse des carburants, grève des travailleurs : le Tchad va-t-il s’enflammer à la veille de la présidentielle ?

Alors que les fonctionnaires entamaient leur deuxième semaine de débrayage pour contester la hausse du prix du super et du gasoil à la pompe, les frictions entre le pouvoir et le Parti socialiste sans frontières (PSF) ont débouché sur un bain de sang. Avec en prime la mort de Yaya Dillo, farouche opposant au régime de transition et potentiel candidat à la présidentielle.

Le 28 février 2024, des coups de feu ont de nouveau retenti à Ndjamena, contribuant à alourdir le climat social déjà très tendu au Tchad ces derniers jours, suite à une certaine grogne populaire, née de la hausse des prix du super et du gasoil à la pompe. Tout commence le 27 février, avec l’arrestation d’un cadre du Parti socialiste sans frontières (PSF), accusé de « tentative d’assassinat » contre le président de la Cour suprême. « Cette situation a pris une tournure dramatique, avec l’attaque délibérée des complices de cet individu, menées par des éléments du PSF et à leur tête le président de ce mouvement Yaya Djillo, contre les locaux de l’Agence nationale de sécurité de l’Etat (Anse), occasionnant plusieurs morts », relate le ministre de la Communication, Abderaman Koulamallah, dans un communiqué signé le 28 février 2024.

« Je n’étais pas présent », s’était défendu Yaya Dillo à l’Agence France presse (AFP), sur son implication dans l’attaque des locaux de l’Anse. « Le but recherché est de m’empêcher, de m’éliminer physiquement, (…) pour me faire peur afin que je n’aille pas à l’élection », a-t-il poursuivi. Ce même 28 février 2024, selon des sources locales, des hommes lourdement armés, présentés comme des éléments de l’armée régulière du Tchad, vont assiéger le quartier général du PSF. Sous le feu nourri des balles tirées en guise de représailles à l’attaque des locaux de l’Anse, plusieurs membres de ce parti politique vont trouver la mort. Parmi eux, le président du parti, Yaya Djillo, cousin et principal opposant du président de la transition, le Général Mahamat Idriss Déby.

Avec cette disparition, un potentiel candidat à la prochaine élection présidentielle et farouche opposant au président de la transition, quitte la scène. Non sans faire planer sur le Tchad le nuage d’un renforcement des lignes de fracture entre le gouvernement de transition et une certaine opposition. A la veille de l’élection présidentielle, dont le premier tour est annoncé pour le 6 mai 2024, pour mettre un terme à une transition politique en cours depuis 2021, à la suite du décès du président Idriss Déby Itno. Cette fin de la transition se fera donc sans Yaya Djillo, dont le décès lors de l’assaut du siège de son parti a été confirmé le 29 février 2024 par le ministre de la communication du Tchad.

Appels à candidature

En revanche, la fin de la transition qui se profile à l’horizon au Tchad devrait se faire avec le Général Mahamat Idriss Déby, favori pour sa propre succession, après le dévolu jeté sur lui, en janvier 2024, par les militants du Mouvement patriotique du salut (MPS), parti politique fondé par son père, feu le Maréchal Idriss Déby Itno, et qui tient les rênes du Tchad depuis des décennies. Depuis ce choix sur sa personne, d’autres appels émanant cette fois-ci de forces vives et autres membres de la société civile déferlent en faveur d’une candidature de l’actuel président de la transition. Les derniers appels à la candidature du Général Mahamat Idriss Deby ont eu lieu le 25 février 2024 à Ndjamena. Une kyrielle d’organisations de la société civile, de militants de droits de l’homme, d’associations de jeunes, de femmes et même des handicapés s’y sont retrouvés pour adresser des motions de soutien à l’actuel locataire du palais Toumaï.

Ces derniers appels du peuple ont d’ailleurs eu le don d’éclipser un tant soit peu la grogne des fonctionnaires tchadiens, qui depuis dix jours débrayent pour obtenir le retrait de la décision du gouvernement d’augmenter les prix du super et du gasoil à la pompe, en vigueur depuis le 13 février 2024. Une décision aussitôt dénoncée par les syndicats des travailleurs, qui avaient à l’occasion lancé un mot d’ordre de grève de six jours, à compter du 20 février 2024. Face au mutisme du gouvernement après les six premiers jours de grève diversement suivie par les travailleurs, les syndicats ont décidé de durcir un peu plus le ton, avec une reconduction du mot d’ordre pour deux semaines. « Le gouvernement nous a totalement ignorés. Eh bien, il n’y a pas autre chose à faire que de continuer la grève et vous avez constaté la colère des travailleurs. Les travailleurs sont pour descendre tout de suite dans la rue, descendre pour marcher. Les travailleurs sont pour une grève sèche et illimitée. », confie Michel Barka, président de l’Union des syndicats du Tchad.

En effet, depuis le 13 février 2024, le gouvernement tchadien a respectivement fait passer à 730 FCfa, 828 FCfa et 580 FCfa, les prix du super, du gasoil et du Jet A1 dans les stations-service de Ndjamena. Dans les provinces, ces prix sont majorés des coûts du transport. L’analyse de la nouvelle grille tarifaire des produits pétroliers à la pompe révèle que le litre de super connaît l’une des plus importantes augmentations au Tchad depuis des décennies. En effet, en portant à 730 FCfa le litre de super, contre 518 FCfa suite à l’augmentation d’avril 2023, le gouvernement fait exploser le prix de ce produit de 40,9%. En passant de 700 FCfa à 828 F Cfa, le prix du litre de gasoil augmente quant à lui de 18,3%, contre 5,4% pour le jet A1, dont le prix du litre est passé de 550 à 580 FCfa.

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