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Tribunal criminel spécial : les avocats de Camwater réclament la tête d’Atangana Kouna

De concert avec le Ministère public, ils plaident pour la condamnation de l’accusé pour les faits présumés d’intérêt dans un acte, dans le cadre d’un contrat commercial passé entre société Trinity Sarl et la société d’Etat dont il était dirigeant à l’époque des faits.

Il ne fait l’ombre d’aucun doute. Le Ministère public et les Avocats de la Cameroon Water Utilities(Camwater) sont certains et constants dans leurs déclarations. Une certitude et une constance qui repose sur l’existence réelle des infractions imputées aux accusés Basile Atangana Kouna et Thomas Nama Aloa. Le premier répond des faits d’intérêt dans un acte, et le second, l’infraction de complicité de détournement de biens publics (Dbp).

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A l’audience du 03 septembre dernier, l’accusation fait bloc contre la défense. « Nous sommes dans une situation où, la société de l’accusé Basile Atangana Kouna (Trinity Sarl) gagne un marché. C’est le même accusé, à l’époque des faits, qui est directeur général de la Camwater qui valide les factures par rapport à ce marché qui lui rapporte des bénéfices. » De ce fait, Me Mba, l’un des avocats de l’entreprise d’Etat estime que « L’infraction d’intérêt dans un acte est « suffisamment caractérisée. » Son collègue, Me Albert Oyié prend au pied de lettre cet argument. Ce dernier estime que le délit d’intérêt dans un acte « manière absolue dans ses détails vis-à-vis des accusés. » Me Oyié qualifie de « société d’écran », l’entreprise Trinity Sarl. Cette société de location de véhicule est la propriété de Basile Atangana Kouna.

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Dans le cadre des travaux d’extension de 52 centres en eau potable, un contrat commercial est passé entre a structure Aspac Cemac Sarl à hauteur de 10 millions Fcfa. Camwater entretient une sous-traitance avec cette dernière et vise les factures. Il est question pour l’entreprise Trinity Sarl, de mettre à la disposition de la société Aspac Cemac Sarl, des véhicules pour la visite des travaux nécessaires à l’extension des centres en potable.

Me Oyié soutient que l’entreprise Trinity Sarl est une « société écran ». Pour cause ? « Avant les marchés, elles n’existaient pas. Elles n’existent qu’après le lancement des appels d’offres » .L’avocat de la Camwater dénonce le caractère illégal du marché passé entre cette société et l’entreprise d’Etat. Il pointe à un doigt accusateur sur la qualité de Basile Atangana Kouna. « Le Dr Basile Atangana Kouna est un fonctionnaire. Les fonctionnaires ne font pas les affaires. C’est inacceptable, du moins en ce qui concerne nos lois. Les fonds litigieux ont bénéficié à monsieur le ministre».

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Le Ministère public dans ses réquisitions a donné le ton. L’Avocat général déplore le fait pour Basile Atangana Kouna de soumissionner avec une entreprise privée, « un marché attribué par une société sous son autorité. » Dans son développement, le représentant du Parquet général note les éléments qui, à ses yeux sont constitutifs de l’infraction d’intérêts dans un acte :« les factures payées par la Camwater (Cameroon water utilities cooporation) aient visées par le directeur général de l’époque, Basile Atangana Kouna».

Pourquoi la prise d’intérêts ?

L’infraction d’intérêt dans un acte est définie à l’article 135 du Code pénal camerounais : « Est puni d’un emprisonnement de 01 à 05 ans, et d’une amende de 200 mille Fcfa à 2 millions Fcfa, tout fonctionnaire ou agent public qui, directement ou indirectement, prend ou reçoit un intérêt :a)Dans les actes ou adjudications soumis à son avis, ou dont il avait la surveillance, le contrôle, l’administration, ou la passation ;

b)Dans les entreprises privées, les coopératives, les sociétés d’économie mixte ou participation financière de l’Etat, les régies, les concessions soumises à sa surveillance ou à son contrôle ;

c)Dans les marchés ou contrats passés au nom de l’Etat ou d’une collectivité publique, avec la personne physique ou morale ;

d)Dans une affaire pour laquelle il est chargé d’ordonnancer le paiement ou d’opérer la liquidation… » L’alinéa (2) de cette article indique que « les dispositions du présent article sont applicables aux anciens fonctionnaires et agents publics tels que définis à l’article 131 du présent Code qui, dans les 05 ans à compter de la cessation de leurs fonctions par suite de démission, destitution, congé, mise en disponibilité ou à la retraite, ou pour toute autre cause, prennent un intérêt quelconque dans les actes, opérations ou entreprises susvisés et précédemment soumis à leur surveillance, contrôle, administration ou dont ils assuraient le paiement ou la liquidation ».

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En outre, Me Mba invite le Tribunal à prendre en compte un détail : la filiation entre l’accusé Basile Atangana Kouna et son codétenu, Thomas Nama Aloa. Ce dernier est le neveu de l’Ex-directeur de la Camwater. Il est reproché à Thomas Nama Aloa, la création de l’entreprise Aspac Cemac Sarl. Création matérialisée par la fourniture à l’accusée dame Yondo Kolko Vanessa de sa Carte nationale d’identité, afin que la structure ait une existence juridique. Cette entreprise a, aux dires de l’accusation « facilité l’atteinte à la fortune publique. » Comment ? En favorisant une sous-traitance « non-autorisée ». L’accusation attire l’attention du Tribunal sur l’aveu de culpabilité des accusés sur l’infraction de détournement de biens publics. « Les accusés ont reconnu les faits de détournement de biens publics à travers la restitution du corps du délit. » Il n’en faut pas plus pour militer en faveur de la condamnation des mis en cause. A cet effet, « nous plaidons de déclarer coupable, l’accusé Basile Atangana Kouna d’infraction d’intérêt dans un acte, et les autres coupables de complicité de détournement de biens publics », sollicite l’accusation.

La restitution du corps du délit et ses effets

En dehors de l’infraction d’intérêt dans un acte, l’accusé Basile Atangana Kouna a fait l’objet de poursuites judiciaires pour d’autres infractions. Dans la présente cause, le Tribunal lui a fait initialement le reproche des faits de détournement de biens publics et de violation du Code des marchés publics.

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L’accusé a procédé à la restitution du corps du délit. Le montant de la restitution s’élève à 1,7 milliard de Fcfa. La conséquence de l’offre de restitution est l’abouti à l’arrêt des poursuites pour cette infraction. Elle s’étend cependant sur les faits de violation du Code des marchés publics, en ce que la violation du code des marchés public est le moyen par lequel, le détournement des biens publics a pris corps. Ainsi, avait soutenu le Ministère public.

Dans le cadre de cette affaire, seuls Basile Atangana Kouna et Thomas Nama Aloa prennent part aux audiences devant le Tcs. Les autres coaccusés, à l’instar de Bello Oussoumana, Yondo Kolko Vanessa ont pris la poudre d’escampette. Les avocats de la défense ne manquent pas de se constituer partie civile à l’occasion de ce procès. Ils entendent formuler leur demande en dommage et intérêt au moment venu.

Si la peine maximale de 05 ans est appliquée pour le délit présumé d’intérêt dans un acte à Basile Atangana Kouna, l’accusé aura encore à purger 01 an 06 d’emprisonnement à la prison centrale de Yaoundé Kondengui. L’ex-ministre de l’Eau et de l’Energie y a déjà passé 03 ans 6 mois. Le code pénal prévoit qu’en cas de détention provisoire, la durée de détention est intégralement déduite de la peine privative de liberté prononcée. De plus, l’article 396 (1a) du Code de procédure pénal dispose : « tout prévenu détenu qui a été relaxé ou condamné à une peine d’emprisonnement ou d’amende assortie du sursis, et sans préjudice de l’application de l’article 393 en ce qui concerne les dépens, est immédiatement remis en liberté, s’il n’est détenu pour autre chose.

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b) Il en est de même en cas de condamnation à une peine d’emprisonnement égale ou inférieure à la durée de détention provisoire ». Il convient de noter que Basile Atangana Kouna est également poursuivi dans le cadre d’une autre affaire. Il s’agit de l’Affaire Ministère public, Etat du Cameroun, contre Basile Atangana Kouna, Sollo Jean William, Victor Stanislas Atangana, René Martin Mbida, Jean Parfait Koé, Jean Dieudonné Mah, accusés d’infractions de détournement de biens publics et complicité.

René Ombala

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