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Whisky en sachet : le gouvernement interdira ou n’interdira pas ?

Le dernier moratoire accordé aux producteurs expire le 31 décembre prochain, mais les autorités restent étonnamment muettes sur le sujet. Le gouvernement a interdit la production et la commercialisation de ces boissons depuis 2012, mais reste indécis - sur fond de légèreté - quant à leur retrait définitif du marché.

8 ans que la mesure d’interdiction de la production et la commercialisation du whisky en sachet peine à entrer en vigueur. Le gouvernement avait accordé aux producteurs deux moratoires successifs, d’abord sur les années 2014 et 2016, puis sur les années 2016 à 2022, deux moratoires pour leur permettre d’écouler les stocks déjà produits et amortir leurs investissements. Mais, ces moratoires ont créé un tel vide juridique que, tous les contrôles de conformité sur ces boissons avaient été suspendus par l’Agence des normes et de la qualité (Anor) en attendant la migration vers les bouteilles à l’échéance indiquée. A en juger par la floraison des marques nées entretemps et commercialisées dans un informel qui ne dit pas son nom, avec des conséquences aujourd’hui non mesurables sur la santé des consommateurs. L’échéance du 31 décembre 2022 arrêtée pour le retrait définitif de ces produits du circuit du marché va-t-elle être respectée ?

Il y a de quoi en douter au regard du mutisme qui entoure ce sujet, à 10 jours de la fin de la dérogation spéciale accordée par les autorités. Alphonse Ayissi Abena, président de la Fondation camerounaise des consommateurs (Focaco), est radical. « Nous demandons au gouvernement d’être ferme. Nous ne voulons plus de moratoire parce que ces boissons font des ravages en ville comme au village ». En effet, contrairement à l’année 2021 où il avait abordé la question au Parlement et promis fermement qu’il n’y aurait de whisky en sachet sur le marché passé ce délai, le ministre des Mines, de l’Industrie et du Développement technologique (Minmidt), Gabriel Dodo Ndoke, ne s’est exprimé ni devant le Sénat, ni devant l’Assemblée nationale sur cette question lors de la session de novembre-décembre. Or, un an plus tôt, il jurait qu’ « à partir du 1er janvier 2023, la norme devrait être appliquée et respectée par tous dans ce domaine ». Plus curieux, même les sénateurs et les députés ont fait l’impasse sur la question.   

Critiques        

Officiellement, la vente du whisky en sachet est interdite au Cameroun pour des raisons de santé publique. Car, en plus de leur forte teneur en alcool, la plupart des marques de whisky en sachet (et même ceux conditionnés dans les bidons) contiendraient du méthanol, une substance très nocive pour l’homme. Dans un arrêté conjoint signé le 12 septembre 2014, les ministres de la Santé publique, du Commerce et des Mines, de l’Industrie et du Développement technologique, ont rendu d’application obligatoire la norme sur la production des liqueurs et autres spiritueux. Cette mesure du gouvernement donnait ainsi aux producteurs camerounais 24 mois pour écouler les stocks existants. Le directeur général de l’Anor, Charles Booto à Ngon, avait effectué une sortie à la suite de cette décision pour indiquer que passée l’échéance du 17 septembre 2016, plus aucun whisky en sachet ne serait plus présent sur le marché. La mesure gouvernementale, largement saluée par l’opinion, avait essuyé de vives critiques de la part des producteurs. Notamment, de Fermencam, producteur des marques King Arthur, Lion d’Or, etc. 

Argument économique

Son directeur général, Maurice Djeutchoua, avait brandi l’argument du nombre d’emplois créés par son unité de production et son chiffre d’affaires en constante progression (12 milliards Fcfa en 2013 contre 9 milliards Fcfa un an plus tôt). Mais,  8 ans après, c’est le statu quo, signe que l’argument économique l’a emporté sur celui de santé publique. Entretemps, rien ne filtre sur les travaux du programme d’accompagnement des acteurs du secteur, mis en place par le ministère des Mines. Celui-ci se déclinait ainsi qu’il suit : l’identification et la localisation de toutes les entreprises concernées ; l’implication des autorités administratives pour la lutte contre la contrebande et la contrefaçon dans le secteur ; la réception dans les services de ce département des plans de migration de chacun des acteurs (c’est chaque acteur qui propose son plan de migration, c’est chaque acteur qui acquiert ses équipements et qui doit les réadapter pour se conformer à terme à la norme) ; la notification de l’arrêté à l’effet de lancer formellement le programme d’accompagnement, puis introduire une nouvelle disposition qui soumettra l’importation de l’alcool éthylique à une procédure de déclaration annuelle.

Par ailleurs, il était prévu l’organisation régulière des descentes dans les entreprises à l’effet de contrôler et de suivre la qualité de produits contenus dans le sachet ; le suivi de la collaboration existante entre ces entreprises et les laboratoires d’analyses nationaux et internationaux ; le suivi de la mise en œuvre des plans de migration que ces entreprises ont transmis à l’administration et la manière dont elles les mettent en œuvre elles-mêmes. Ces plans de migration visaient, entre autres objectifs, à permettre aux producteurs de modifier progressivement leur outil de production en prélude à l’interdiction totale de la commercialisation de whisky en sachet à partir de janvier 2023 et à restructurer leurs stratégies commerciales à l’effet d’étendre leur marché vers les pays étrangers.

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