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Afrique

Tchad : comment le climat social à la Sonacim conforte le projet de privatisation de cette cimenterie par l’Etat

Les employés de cette entreprise publique viennent de lancer un énième mouvement de grève, pour réclamer de meilleures conditions de travail. Des voix s’élèvent pourtant dans le pays contre la décision du gouvernement d’y céder la majorité de ses actifs, pour tenter de donner une chance de survie à cette cimenterie en permanence en proie à des difficultés financières.

Publiée mercredi 3 avril 2024 à 22:33:11Modifiée vendredi 3 mai 2024 à 12:12:24Temps de lecture 4 minPar Simon Pierre Mbarga

Installations de la Sonacim au Tchad
Installations de la Sonacim au Tchad

Après trois jours de grève avec service minimum, du 30 mars au 1er avril 2024, les employés de la Société nationale du ciment (Sonacim), entreprise dont le capital est contrôlé par l’Etat tchadien, ont lancé cette fois-ci une grève illimitée depuis le 2 mars 2024. Cette décision fait suite à des négociations infructueuses avec la direction générale. En effet, apprend-on de sources locales, du fait de difficultés financières, les dirigeants de la Sonacim ne parviennent pas à satisfaire les revendications des employés en colère. Il s’agit, entre autres revendications, du paiement régulier des salaires, de l’immatriculation des employés à la sécurité sociale, de la prise en charge sanitaire, ou encore de l’établissement des contrats à certains agents…

Le durcissement de cette grève lancée depuis le 30 mars 2024 devrait induire un nouvel arrêt de la production dans l’usine de Baoré, jusqu’à nouvel avis. Avec un impact attendu sur le marché local du ciment déjà très tendu, en raison des prix non maîtrisés. Mais, au Tchad, les grincements de dents des 430 employés de la Sonacim semblent être devenus banals. De même que les arrêts de production de l’usine ouverte en 2012, mais dont les difficultés d’exploitation font partie de l’ADN. Le dernier épisode remonte à la fin de l’année 2022. En effet, rendu au mois de janvier 2023, les responsables de cette unité industrielle confessaient que l’usine de Baoré n’avait pas produit le moindre sac de ciment depuis six mois, faute d’une pièce de rechange sur un équipement.

Lire aussi : Tchad : le gouvernement veut céder 70% de ses parts dans la Sonacim au secteur privé

En décembre 2020, après une perfusion financière de l’Etat, alors estimée à environ 3,5 milliards de FCfa, cette même cimenterie avait repris la production, après un arrêt des activités plus prolongé cette fois-ci, puisque remontant à l’année 2018. Cet autre épisode a lui-même été précédé de plusieurs autres du même acabit, ponctués par des mouvements d’humeur récurrents des salariés, ainsi que des accusations de mauvaise gestion des dirigeants (augmentation de la dette fournisseurs ; assistance technique onéreuse de la société égyptienne Riga ; cession des droits d’exploitation des carrières a un privé avec obligation pour la Sonacim de supporter les charges de carburants ; cession à valeur réduite du parc à engins de la société à un privé, etc.).

« La cimenterie de Baoré va être vendue. Elle a consommé beaucoup de milliards et enrichi beaucoup de personnes au détriment de la région (du Mayo-Kebbi Ouest) et du pays. Ça ne peut pas continuer. On va privatiser la Sonacim pour le bien des Tchadiens et pour le bien de la région. On verra quelle entreprise étrangère va la racheter pour produire du ciment à moindre coût », va finalement annoncer le Premier ministre du Tchad de l’époque, Saleh Kebzabo, apparemment exaspéré par la situation de cette entreprise publique. C’était en janvier 2023. Joignant l’acte à la parole du chef du gouvernement, la Commission technique chargée du désengagement de l’Etat des entreprises a lancé, en mai 2023, un avis appel d’offres international, en vue de la cession à un partenaire privé de 70 des 92% des parts détenues par l’Etat tchadien dans le capital de la Sonacim.

Malgré la levée de boucliers qu’a suscitée dans certains partis politiques et des organisations de la société civile l’annonce de la privatisation de la Sonacim, Ndjamena ne démord pas. Conscient certainement de ce que, comme cela s’est vu ailleurs, les privatisations charrient toujours de nouveaux capitaux à injecter dans les sociétés à privatiser ; et apportent généralement compétitivité et rentabilité, même sur le moyen terme, du fait du renforcement de la gouvernance d’entreprise par les repreneurs, très souvent plus soucieux de leur retour sur investissement que l’Etat. Autant de balises qui apparaissent à la fois nécessaires et inévitables sur le chemin de la survie de la Sonacim. 

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