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Cameroun-RCA : les échanges commerciaux paralysés à Gari-Gombo

Malgré la réouverture de la frontière en 2016 après 7 ans de fermeture, les échanges commerciaux entre les deux pays restent timides dans cette localité de l’Est qui, autrefois servait de point de ravitaillement en produits de première nécessité pour les milliers d’employés, et les commerçants en provenance des grands pôles économiques en République Centrafricaine. Une situation aggravée par les retards dans les travaux de construction du marché frontalier lancés en novembre 2014. Pour venir à bout de cette paralysie commerciale, le ministre de l'Economie, de la Planification et de l'aménagement du territoire, Alamine Ousmane Mey, a décidé de la reprise des travaux du marché.

« Rien ne marche ici à Gari-Gombo, nous sommes là seulement pour jouer au maintien. Les activités économiques et les échanges commerciaux sont au point mort depuis plusieurs années aujourd’hui parce que les Centrafricains ne traversent plus ici. D’ailleurs plusieurs grands commerçants de Gari-Gombo ont fermé boutique parce que les affaires ne marchaient plus ». Propos tenus par Aladji Nourou, commerçant depuis plus de 20 ans basé à Gari-Gombo, chef-lieu d’arrondissement éponyme dans le département de la Boumba-et-Ngoko à l’Est. Pourtant, c’est par Gari-Gombo que les commerçants provenant des grands pôles économiques en République Centrafricaine se ravitaillent en produits de première nécessité pour les milliers d’employés chaque jeudi, jour du marché périodique. Ils s’agissent des commerçants de la zone abritant les installations de la société forestière de la Kadey (Sofokada) implantée à Dédé Mokouba, localité centrafricaine, située à 9 km de Gari-Gombo et de la zone de Bamba située à 45 km où est implanté le groupe Thanry Centrafrique (TCA). Depuis des décennies en effet, le marché périodique de Gari-Gombo était devenu un lieu de brassage et d’échanges qui faisait vivre l’économie de la commune de cet arrondissement. « Entre 1990 et 2000, je réalisais un chiffre d’affaires de plus de 2.000.000 Fcfa chaque jour du marché périodique mais aujourd’hui on n’a que nos yeux pour pleurer », se lamente notre interlocuteur, Aladji Nourou. La chute des transactions commerciales entre le Cameroun et la RCA à Gari-Gombo a commencé en début 2009 avec la fermeture de la frontière entre les deux pays par Félix Missing Mimbang alors préfet du département de la Boumba et Ngoko. C’était suite aux hostilités exercées par les Centrafricains sur une entreprise camerounaise qui réalisait les travaux de reprofilage de 3,5 km de route qui séparent le Cameroun et la RCA.

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Une fermeture qui avait aboutie à la paralysie générale des activités économiques aussi bien en RCA qu’au Cameroun et qui a durée 7 ans puis que c’est lors de la tournée de prise de contact et d’animation socioéconomique de Grégoire Mvongo, gouverneur de l’Est dans le département de la Boumba et Ngoko en mars 2016 que cette frontière a été rouverte. Pour matérialiser cette réouverture, Leonard Bello, alors préfet de la Boumba et Ngoko avait enlevé les scellés sur la barrière estimant que le climat de sécurité en République Centrafricaine et au Cameroun était à nouveau propice aux échanges commerciaux. « A partir d’aujourd’hui, je déclare ouverte cette frontière », avait-t-il déclaré. Malheureusement de nos jours, les activités économiques et les échanges commerciaux sont morts à Gari-Gombo. Cette chute d’activités a pour corollaire, la baisse de revenu dans les ménages des populations locales majoritairement constituées d’agriculteurs et pêcheurs estimés à 28.000 habitants auxquels se sont ajoutés plus de 4000 réfugiés centrafricains. Réagissant quelques mois après, Simon Kallah, alors maire de la Commune de Gari-Gombo entre 2013-2020 avait reconnu que « la réouverture de la frontière n’a pas encore eu un effet positif sur les recettes municipales parce que les activités économiques n’ont pas réellement renoué ».

Marché frontalier

Pour favoriser les échanges commerciaux entre le Cameroun et la RCA, le gouvernement camerounais avait entrepris de construire un marché frontalier à Gari-Gombo. Les travaux avaient été lancés en novembre 2014 pour un financement initial d’environ 400 millions de Fcfa. Malheureusement, ces travaux ont été abandonnés alors que l’entreprise avait pourtant consommé environ 200 millions de Fcfa.

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En mars 2018, pendant sa tournée d’animation socio-économique, le gouverneur de l’Est, Grégoire Mvongo, avait visité cet investissement abandonné. A la suite de cette descente, l’autorité administrative a mené des plaidoyers auprès des départements ministériels concernés en vue de son achèvement. Aussi, en février 2021, au cours d’une cérémonie publique, présidée par le ministre du Commerce, le maire de Gari-Gombo avait aussi exprimé cette préoccupation de relancer les travaux du marché frontalier. D’autant qu’il favoriserait de franchir le pas vers l’idéal de libre échange continental prôné par les chefs d’Etat de la zone CEMAC. « Il faut rappeler que le marché frontalier de Gari-Gombo résulte de la volonté politique du Chef de l’État qui, lors de la campagne en vue de sa réélection en 2011 avait annoncé un vaste programme d’investissement prioritaire. Dans la région de l’Est, les communes de Gari Gombo, de Moloundou (Socambo) et Garoua-Boulaï ont été bénéficiaires de ce programme à travers l’attribution de ces marchés. Seulement, s’agissant de Gari Gombo, depuis 2014 les travaux de notre marché sont à l’arrêt avec un taux de réalisation d’environ 25 % », indique une élite et conseiller municipal de Gari-Gombo. Selon une source proche de l’entreprise adjudicataire, « il a été constaté l’absence d’une ligne affectée à ces travaux, ce qui a rendu sa réalisation compliquée, le prestataire ne pouvant bénéficier d’un décompte tel que consacré dans les commandes publiques par la réglementation en vigueur».

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En réaction et à travers une lettre, datant du 4 août 2021, adressée à son délégué départemental de la Boumba et Ngoko, le ministre de l’Economie, de la Planification et de l’aménagement du territoire, Alamine Ousmane Mey, a décidé de la reprise des travaux de ce marché frontalier. « En vous communiquant l’imputation budgétaire 94 709 07 110000 2226, exercices 2021 et suivants pour le financement des travaux de construction du marché frontalier de Gari-Gombo, département de la Boumba et Ngoko, région de l’Est, exécutés par l’entreprise Manu SARL, pour un montant global TTC 287 452 584 Fcfa, j’ai l’honneur de vous demander de prendre toutes les dispositions nécessaires, en concertation avec les parties prenantes (délégué départemental des travaux publics et le maire de Gari-Gombo) pour la reprise et l’achèvement desdits travaux », instruit le ministre Alamine Ousmane Mey à son collaborateur.

« Une opportunité d’affaires indéniable »

Hervé Simomori De Bringue, maire de la commune de Gari-Gombo

La nouvelle de la reprise des travaux de construction du marché frontalier de Gari-Gombo a été accueillie avec une très grande joie non seulement pour le maire acteur principal du développement local, mais aussi par le collectif des commerçants, des hommes d’affaires et des populations. La réalisation du marché frontalier de Gari-Gombo viendra à coup sûr augmenter le niveau et la qualité des échanges avec un intérêt certain pour les bénéficiaires que ce soit la commune, l’État à travers les recettes douanières, que les commerçants sans distinction de catégorie. Chacun pourra tirer le meilleur de son déploiement et c’est une embellie pour la souveraineté du territoire camerounais à la frontière et une marque incontestable de son leadership sous régional.

Ici on échange les produits de consommation tels que les macabo, manioc, banane plantain, des vestimentaires. Au-delà du caractère purement frontalier il faut souligner que la ville de Gari Gombo occupe une position stratégique dans le département de la Boumba et Ngoko en ce sens qu’elle est la principale porte d’entrée vers le nord et ouvre sur les villes très importantes telles que Yokadouma et Moloundou où se situe l’une de nos frontières avec la République du Congo. Voilà donc une opportunité d’affaires indéniable qu’il va falloir capitaliser pour le développement du tissu économique de notre commune.

Martin Foula

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