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Cameroun : l’urgence d’orienter les transferts de fonds de la diaspora vers le secteur productif 

Expéditeurs de fonds, investisseurs, philanthropes, innovateurs, les multiples rôles joués par la diaspora révèlent l’intérêt et la nécessité pour les pouvoirs publics de nouer des partenariats plus étroits et plus productifs avec les Camerounais de l’étranger.

Christian Kouam est connu au Cameroun comme PDG de Autohaus-Cameroon, importateur officiel de Volkswagen, une entreprise créée en 2016 avant de lancer, en 2016, la toute première académie de formation en mécatronique automobile au Cameroun et en Afrique au sud du Sahara. Mais cet ingénieur de construction automobile ayant travaillé pendant 15 ans chez Volkswagen et docteur en gestion d’entreprise est par ailleurs un ancien président de la Cameroon Diaspora network Germany (réseau des Camerounais vivants en Allemagne). Ses positions sur l’implication de la diaspora au développement national semblent iconoclastes : «Je ne pense pas que les problèmes de la diaspora vont se résoudre avec de nouvelles structures. Il faudrait plutôt trouver des contenus pour les contenants déjà existants », soutient-il. 

Plus que la double nationalité qu’on retrouve sur toutes les langues, « la réduction ou même l’annulation des frais de visa peut mieux dynamiser le tourisme et le commerce intérieur. On pourrait d’ailleurs avec cette décision remettre Camair- Co à flot », suggère l’entrepreneur. De même, l’idée d’un fonds dédié à la diaspora ne serait pas très pertinente. « Je pense que les locaux ne peuvent pas financer la diaspora à travers des fonds. Ça ne serait pas un bon signal si la diaspora devait se positionner pour avoir les financements publics. »

C’est dans cet ordre d’idées que l’Organisation internationale pour les migrations et le Migration policy institute ont réalisé en 2012, après plus de dix ans d’analyse, un Manuel : «Comment associer les diasporas au développement », qui recense les enseignements tirés des mesures prises par les pouvoirs publics à travers le monde en faveurs de la diaspora, celles qui ont réussi et celles qui ont échoué et les raisons pour lesquelles il en a été ainsi.

Sous-financement

D’emblée, les auteurs du Manuel notent que la plupart des institutions qui s’occupent des diasporas sont sous-financées. En comparant les crédits budgétaires à la part de la population qui réside à l’étranger, on peut se faire une idée juste de l’ampleur des dépenses publiques affectées à la diaspora. Selon cette méthode, le Cameroun qui a consacré 34,236 milliards de Fcfa au ministère des Relations extérieures (0,69% du budget 2019) devrait sans doute accroître le financement des mesures visant la diaspora puisque 5,2 millions de Camerounais (21,36% de la population) étaient recensés à l’étranger en 2018 d’après le Minrex et le Bureau Central des Recensements et des Études de Population (Bucrep). En comparaison, le Mali qui compte 10% de sa population à l’étranger alloue 7% de son budget aux structures dédiées à la diaspora. Un autre critère proposé est le rapport entre les rapatriements de fonds et le PIB. En 2018, la diaspora a envoyé 344,1 milliards de Fcfa au Cameroun soit 1,6% du PIB évalué à 21 493 milliards de Fcfa par le ministère des Finances. Au Mali, les rapatriements des fonds atteignent 3% du PIB.

Il apparaît donc que les Camerounais de l’étranger peuvent faire beaucoup plus que ce qui a été fait jusqu’à présent. De même, le gouvernement doit trouver des partenariats plus étroits et productifs pour stimuler l’engagement de la diaspora. Le rapatriement des fonds, l’investissement direct, le transfert de capital humain, les contributions philanthropiques, l’investissement dans les marchés financiers et le tourisme étant présentés comme des domaines clés dans lesquels les diasporas interviennent le plus efficacement au développement de leur pays d’origine.

Sans doute le lien le plus tangible entre la migration et le développement, le rapatriement des fonds est aussi pour certains pays une source essentielle de devises et un facteur de stabilité macroéconomique. Pour doper cette activité, le Forum mondial sur la migration et de développement propose de « favoriser la vente croisée de produits financiers complémentaires, telles que les hypothèques garanties par les rapatriements de fonds, la titrisation des rapatriements de fonds, etc. » En Egypte, par exemple, les migrants qui recourent aux banques bénéficient d’un abattement pouvant durer 10 ans à partir du premier par voie officielle.

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