Politiques Publiques

Politique sociale : le Cameroun encore loin de ses engagements

Malgré l’importance relative des enve­loppes budgétaires, les secteurs de la Santé, de l’Edu­cation et Agricole restent sous finan­cés. Ce qui hypo­thèque l’ambition d’émergence.

Réunis le 28 mars 2020 à Brazzaville au Congo à l’occasion d’une session extraordinaire du programme de réformes économiques et financières de la Cemac (Pref-Cemac), les ministres en charge des Finances et de l’Economie ont ainsi recommandé aux Etats de la Cemac « d’adopter, dans les plus brefs délais, des Lois de finances rectificatives 2020 pour aligner la gestion des finances publiques sur des prévisions actualisées et réa­listes des recettes budgétaires et des dépenses publiques, en vue de renforcer les moyens de lutte contre la propaga­tion de la pandémie du Co­vid-19, tout en garantissant le fonctionnement régulier de l’État ». En droite ligne avec cette recommandation, l’on s’attendait donc à ce que le secteur de la Santé prio­risé dans le collectif budgé­taire annoncé. A l’arrivée, le compte n’y est pas vraiment.

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Dans une interview à nos confrères du quotidien gouvernemental, Came­roon tribune », le ministre des Finances, Louis Paul Motaze, explique que dans l’ordonnance du 03 juin 2020 consacrant le collectif bud­gétaire, « toutes les adminis­trations ont subi une baisse d’environ 20% de leurs dota­tions budgétaires, à part les ministères sociaux (Santé, Education, Minesup, Mine­fop, Minproff). Bien plus, le ministre voit la création d’un compte d’affectation spécial dénommé « Fonds spécial de solidarité nationale pour la lutte contre le coronavirus et ses répercussions écono­miques sociales » doté d’une enveloppe de 180 milliards de FCFA comme le signe tan­gible de l’engagement social du gouvernement.

Mais à bien y regarder, la réalité est moins nette. En effet, le ministère de la Santé publique (Minsanté) voit cu­rieusement son budget réduit de 27,42 milliards de FCFA en autorisations d’engage­ments et de 24,836 milliards en crédits de paiements. Ce qui situe ce département mi­nistériel au 3e rang des plus grosses réductions arrêtées par le chef de l’Etat. Le Min­santé pèse désormais 4,28% du budget de l’Etat dans la loi de finances rectificatives contre 4,31 dans la loi de finances initiale.

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Capital humain

Selon la Déclaration d’Abuja de 2001, les États membres de l’UA se sont engagés à consa­crer 15% de leur budget gou­vernemental pour la santé. Cela représente donc un gap de 529,104 milliards de FCFA pour le secteur Santé, rien que cette année dans le budget initial et 172,55 mil­liards dans le budget révisé.

Il en est de même pour l’agri­culture. Lors du Sommet de l’Union africaine de 2003, à Maputo, en Mozambique, les Etats ont décidé d’affecter une allocation minimale de 10% des dépenses publiques dans le secteur agricole chaque année. Un engage­ment que le Cameroun peine à respecter. Cette année, le secteur agricole qui englobe le ministère de l’Agriculture et du développement rural (Minader) et le ministère de l’Elevage, des pêches et des industries animales (Mine­pia) a reçu une enveloppe cu­mulée de 125,738 milliards de FCFA dans le budget ini­tial, ramenée à 101,798 mil­liards dans le budget modifié soit 2,31%.

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Le secteur éducatif n’est pas en reste. Selon le Document de stratégie pour la crois­sance et l’emploi (Dsce), cadre de référence de l’action gouvernementale, le secteur doit recevoir 18% des res­sources publiques. Au niveau continental, la moyenne est de 20%. En 2020, le secteur de l’Education c’est-à-dite le ministère de l’Education de base (Minedub), le ministère des Enseignements secon­daires (Minesec), le minis­tère de l’Enseignement supé­rieur (Minesup) reste loin du compte. Juste 675,516 mil­liards dans le budget modifié soit 15,32% de l’enveloppe.

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Pourtant, le « sous finance­ment » de ces secteurs n’est pas sans conséquences socio­économiques. « Le renforce­ment du capital humain et la réduction des inégalités sont des politiques rentables, qui sont sur le chemin critique de l’émergence [du Cameroun] », rappelle l’ambassadeur de la République Française au Cameroun, Christophe Guil­hou, reprenant la doctrine de la Banque mondiale sur l’en­jeu du capital humain.

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