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Cours du cacao : pourquoi les producteurs camerounais sont les mieux rémunérés en Afrique

Avec un revenu de 8 100 dollars la tonne durant cette campagne cacaoyère, le pays d’Afrique centrale s’en tire mieux que les autres producteurs du continent. Il est au coude à coude, à l’échelle internationale, avec l'Équateur, 3e producteur mondial, qui enregistre plus de 8 130 dollars la tonne.

A l’international, les cours du cacao pulvérisent des records historiques avec un sommet absolu atteint en mars 2024 à 8 300 USD par tonne à la bourse de New York. Au Cameroun, le prix aux producteurs a dépassé le seuil de 5 000 Fcfa/kg (environ 8,27 dollars américains/kg); calculette en main, on obtient un équivalent de 5 millions de Fcfa par tonne de fèves (près de 8 100 dollars USD) durant cette campagne cacaoyère 2023-2024. Ainsi, le pays d’Afrique centrale est au coude à coude avec l’Équateur, aujourd’hui 3e producteur mondial de cacao. Dans ce pays, la récolte bat son plein en ce début d’année et les prix aux producteurs sont au zénith, à plus de 8 130 USD/T. Approché par EcoMatin, le négociant Ethiquable, explique dans sa newsletter de fin mars que l‘origine de cette envolée du cours du cacao serait une mauvaise récolte enregistrée en Afrique de l’Ouest, principalement due à des conditions météorologiques peu favorables, la vétusté des plantations et les fortes attaques des maladies du cacaoyer. « Le Ghana et la Côte d’Ivoire ont enregistré une baisse de 65% de leur offre en cacao d’exportation. Etant donné que ceux-ci représentent 60% de la production mondiale de cacao, cette baisse génère un déficit sans précédent sur le marché du cacao. Les stocks internationaux de cacao ayant diminué au cours des dernières années, les tensions conduisent forcément à un déséquilibre entre offre et demande et à une hausse spectaculaire des cours », indique t’il.

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Les cacaoculteurs camerounais ont donc bénéficié de la tendance haussière que traverse actuellement la filière avec un prix bord champ établi à 5 100 FCFA/kg, soit 3 900 Fcfa de plus que le prix de la saison précédente (2022-2023) et un prix moyen à l’exportation (FOB) établi à 6 496 Fcfa/kg contre les 1 400 Fcfa/kg pratiqués durant la campagne 2022-2023. « En 2023, plus d’une centaine de milliers de tonnes de cacao a été vendue aux prix bord champ et FOB publiés au barème de l’Office National du Cacao et du Café. Ainsi, le pays a enregistré une évolution de 85% du cours de son cacao entre les deux dernières campagnes, obtenant le prix de vente bord champ le plus élevé parmi les pays africains producteurs de cacao » explique un expert agréé du Conseil Interprofessionnel du Cacao et du Café (CICC). Lesdites valeurs sont largement au-dessus des prix pratiqués au Togo (2 000 Fcfa/kg), au Nigéria (440 nairas près de 1 674 Fcfa/kg), en Côte d’Ivoire (1 500 Fcfa/kg) et au Ghana (33 120 cédis ghanéens, environ 1 515 Fcfa/kg). L’expert explique que « le marché du cacao au Cameroun est libéralisé contrairement à la Côte d’Ivoire et au Ghana où celui-ci est régulé respectivement par le Conseil Café Cacao (CCC) qui demande aux acheteurs de contractualiser 80 % de leurs besoins de façon anticipée, 6 à 12 mois avant la récolte et le Cocoa Board qui intervient directement sur le marché ghanéen du cacao en achetant et en vendant les volumes de fèves de cacao ».

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Une embellie conjecturelle

D’après les données de l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO), une chute de 30% des cours internationaux du cacao en 2017, passant de 3000 USD/T à 2000 USD/T, a maintenu les deux tiers des producteurs africains en dessous du seuil de la pauvreté pendant 7 ans.

Ainsi, dans le secteur du cacao, les paysans ont une expérience concrète et historique de la volatilité des prix. De l’avis d’un expert, les prix du marché s’envolent une année sur 10, garantissant à ceux-ci une rémunération exceptionnelle temporaire. « Ces courtes périodes sont le plus souvent mises à profit pour capitaliser, pour préparer l’avenir. Les familles achètent une parcelle, améliorent l’habitat ou acquièrent une bicyclette ou une moto. Ils savent que les prix hauts ne durent jamais très longtemps et qu’après la hausse viendra la baisse qui peut, elle, durer assez longtemps », indique l’expert. De plus, selon l’expert, les perspectives à moyen terme militent pour des cours plutôt élevés dans l’avenir. Le changement climatique à l’œuvre et le Règlement européen de lutte contre la déforestation importée sont autant d’éléments qui « laissent à penser que nous sommes à la veille d’une période où le cacao sera plus rare et plus cher ».

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Dans la même dynamique, le  Pr Cyrille Kamdem, expert en économie agricole déclarait au média gouvernemental en novembre dernier que cette envolée des prix des fèves de cacao est un espoir « momentané » pour la filière au Cameroun. « L’embellie des prix du cacao observée au cours de cette campagne est certes un espoir pour la filière mais reste du moins conjecturelle. Il est donc nécessaire de saisir cette opportunité afin d’augmenter la production et optimiser les gains sur ce produit ».

Le marché du chocolat se caractérise par une forte dé-corrélation entre le prix des produits chocolatés aux consommateurs et le prix mondial de la fève. Selon l’expert, la hausse du cours du cacao va directement impacter le consommateur en générant une augmentation de prix d’au moins 0,5 euros (327 Fcfa) par tablette.

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