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Cemac: disparités sous régionales sur la politique monétaire de la Beac

Les experts financiers et monétaires de la zone Cemac se sont réunis du 19 au 23 novembre 2018, à Douala dans l'optique de procéder à une évaluation du nouveau cadre opérationnel de la politique monétaire de la Beac.

La réforme de la politique monétaire de la Banque des Etats de l’Afrique centrale (Beac) entre dans une phase décisive. Les experts financiers et responsables des institutions bancaires des Etats de l’Afrique centrale ont planché sur une nouvelle génération de réformes monétaires décidée le 28 mars 2018, par le Comité monétaire de la banque centrale. Sur initiative de celle-ci, le Comité ministériel  de la Cemac a adopté le 27 mars 2015, deux règlements portant sur « l’institution du marché des titres de créances négociables privés (Tcn) et le mécanisme de pension-livrée« . Par ailleurs, entre le 31 octobre 2013 et le 2 novembre 2017, le même Comité  a adopté d’importantes décisions portant notamment sur le dispositif de gestion collatérale en termes de catégories d’actifs éligibles et de décotes associées, les instruments et modalités d’intervention de la Beac sur le marché monétaire, la méthodologie de fixation des volumes d’intervention, les réserves obligatoires et le dispositif de collecte des données, d’analyse et d’animation du marché monétaire par la Banque centrale.

La première concertation régionale sur le nouveau cadre opérationnel de la politique monétaire de la Cemac examinait ainsi les volets institutionnel, stratégique, analytique et opérationnel  de ce nouveau dispositif monétaire, après celle déroulée du 12 au 14 février 2014 à Douala, sous le thème « marché monétaire de la Cemac : bilan et perspectives, 20 ans après« . La rencontre de 2018 est placée sous le thème « marché monétaire de la Cemac: bilan et pistes d’amélioration« .

Plusieurs questions d’intérêt monétaire feront ainsi l’objet d’un examen minutieux des participants de la sous-région, par des experts de la Banque centrale, de la Cobac et de la Cemac, des représentants des établissements des crédits d’Afrique centrale ou des responsables des marchés financiers : il s’agit précisément d’exposés successifs sur « les instruments de politique monétaire, le collatéral des opérations de politique monétaire, des opérations interbancaires en blanc, des opérations interbancaires avec collatéral, la technique de pension-livrée, des titres de créances négociables privés, du dispositif statistique et animation du marché monétaire par la Beac, des infrastructures de marché dans la Cemac, de l’animation du marché des titres publics et la transparence financière dans la zone Cemac.

Quelques évolutions déjà concrètes en applications de ces nouvelles directives monétaires communautaires: par exemple, depuis le 11 juin 2018, le nouveau cadre de conduite de la politique monétaire sur l’opération principale d’injection de liquidités à fréquence hebdomadaire se fait désormais par appels d’offres régional à taux multiples, avec un taux minimum qui est le principal taux directeur de référence de la Banque centrale, taux d’intérêts des appels d’offres (Tiao). Ainsi, la nouvelle stratégie de politique monétaire consiste désormais à piloter le taux interbancaire de référence autour du Tiao et à l’intérieur d’un corridor constitué par le taux de la facilité de prêt marginal comme taux plafond et le taux de la facilité de dépôt, comme taux plancher. Cette démarche se traduit par des interventions hebdomadaires, à renforcer si nécessaire, par des opérations de réglage-fin au titre soit d’apport supplémentaire, soit de retrait de liquidité.

Lire aussi : Budget 2018: les actes manqués de la Cemac

D’autres faits positifs ont également été observés: en octobre 2018, le volume des échanges de refinancement des établissements de crédits auprès de la Beac a atteint plus de 4000 milliards de FCFA. 1000 milliards de FCFA pour les échanges interbancaires. La dynamique des taux pratiqués sur le marché monétaire de la Cemac présente des taux en nette évolution: 3,00% pour les Tiao, 4,00% pour les Tfpm, 5,00% pour le taux moyen pondéré des montants adjugés et 6,00% pour le taux interbancaire moyen pondéré à 7 jours. Le volume des émissions de Bons de trésor assimilables (Bta) au 31 octobre 2018 est de 6,50%. Concernant les banques n’ayant pas signés des conventions de pension-livrée, sur 55 banques de la sous-région, seules 15 ont fait l’objet d’un enregistrement d’opérations de pension-livrée. Au total, 78 conventions de pension-livrée ont déjà été signées en Afrique centrale, avec « des disparités dans les dynamiques des signatures entre pays: 3 pour le Cameroun, 7 au Gabon, 3 au Congo, 1 respectivement au Tchad et en Guinée équatoriale et 0 pour la Centrafrique.

Plusieurs difficultés subsistent néanmoins dans la mise en application des nouvelles dispositions monétaires en zone Cemac, au regard des statistiques observées. Notamment sur la collecte et la restitution des données du marché monétaire : absence de remontées régulières de données par les acteurs du marché monétaire : du 5 au 11 novembre 2018, le taux de reporting se situe à un taux de 31%. En net recul par rapport à la semaine du 29 octobre au 4 novembre 2018 dont la remontée de reporting affichait un taux de 41%. Autres difficultés décelées par la Beac, le décalage entre les indicateurs de marché et la réalité des faits, mauvais calcul des indicateurs de marché sur la base des données exhaustive, analyse imparfaite de l’évolution des données etc….

Globalement, les faits observés au sein du marché interbancaire de la Cemac présentent un bilan évolutif  « des volumes échangés et dynamique des taux, des évolution croisés des volumes et taux ainsi que des indicateurs de structure du marché interbancaire« .

Entraves

Plusieurs facteurs limitent pourtant les effets de la réforme sur le compartiment bancaire: il s’agit selon les experts de la non-complétude de l’infrastructure de marché, l’appréhension sur le risque de contrepartie, le rôle de la banque centrale dans un contexte de transition vers « le tout marché  » etc…. Quelques pistes d’amélioration seront proposées au terme des travaux de Douala: « engagement public des acteurs en termes de bonne conduite, centralisation des états financiers des établissements de crédit, principe de dénouement des transactions interbancaires par débit d’office, rigueur et anticipations dans la gestion de leur trésorerie, adaptation progressive du dispositif interne de gestion des risques etc…. ‘’

« La réorganisation des instruments et modalités d’intervention de la banque centrale a abouti à plus de cohérence entre les instruments et une meilleure prise en compte des différentes formes de liquidités à travers, notamment, la modernisation de l’opération principale de refinancement, l’instauration des opérations de réglage fin, des facilités permanentes, prêts et dépôts, des opérations de plus longues maturités entre 1,3,6,9 et 12 mois, et enfin, des opérations structurelles, achats/ventes temporaires ou fermes de titres et émission de bons Beac« , apprendra-t-on de Nelida Chumo Mata, adjoint au Directeur de la stabilité financière, des activités bancaires et du financement des économies à la Beac.

Rappelons que les objectifs de la première concertation régionale sur le nouveau cadre opérationnel de la politique monétaire visaient de manière spécifique à mieux apprécier le degré d’appropriation par les acteurs  de marché de la réforme  de la politique monétaire ainsi que des différentes innovations initiées, évaluer le niveau  de mise en oeuvre des points de consensus issus de la grande concertation du 12 au 14 février 2014, afin d’identifier des pistes d’amélioration des acquis et celles d’une poursuite efficace des chantiers restants, insister sur l’importance d’un marché interbancaire efficient pour une conduite efficace de la politique monétaire, entre autres.

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