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Fer de Mbalam : le Cameroun se sert du décès de Dodo Ndoke pour gagner du temps au tribunal arbitral de Paris

Alors que la junior minière attend la décision de la Chambre de commerce international, Yaoundé, lui, demande une extension de délai d’au moins deux mois avant que les débats ne se poursuivent.

Dans le cadre du contentieux qui oppose la junior minière australienne, Sundance Resources, à l’Etat du Cameroun au sujet du projet du fer de Mbalam, des informations font état de ce que la procédure arbitrale à Paris (France) est bloquée du fait du décès de Gabriel Dodo Ndoko, ex-ministre en charge du secteur des Mines, décédé en début de cette année.

A ce propos, Sundance Resources fait cette révélation : « le 21 janvier 2023, le ministre camerounais des Mines, M. Gabriel Ndoke, est décédé subitement dans des circonstances mystérieuses. Le Cameroun a alors demandé un délai pour la procédure d’arbitrage. Le tribunal de la CCI [Chambre de commerce international] a accordé au Cameroun un délai de deux mois, avec la possibilité d’un mois supplémentaire en cas de révision. Le Cameroun a nommé un ministre des Mines par intérim, mais la nomination d’un ministre permanent n’a pas encore été annoncée. Sundance fera le point sur la procédure d’arbitrage engagée contre le Cameroun en temps voulu ».

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Au moment où Sundance Resources révèle cette information, elle n’indique cependant pas à quel mois s’achève l’extension des délais demandée par le Cameroun. Toujours est-il que le Cameroun fait prolonger ainsi le suspens dans ce différend alors que Sundance attend que le juge arbitral se prononce au sujet de ces réclamations à l’encontre de l’Etat camerounais. En effet, dans son mémoire de réclamation déposé à la Cour internationale d’arbitrage de la Chambre de commerce international (CCI) de Paris, la junior minière australienne Sundance Resources informe dans un communiqué du 16 décembre 2021 qu’elle a demandé des dommages de 5,5 milliards de dollars (soit 3 401,6 milliards de FCFA, selon le cours actuel du dollar) dans le cadre du contentieux qui l’oppose à l’État du Cameroun au sujet du projet d’exploitation du fer de Mbalam, à l’Est du pays. 

Cette somme représente 36 fois l’estimation (94 milliards de FCFA) des dépenses engagées lors de la phase de recherche par l’entreprise minière, selon l’ex-ministre camerounais des Mines. Gabriel Dodo Ndocké estimait d’ailleurs que le paiement de cette « dette » mettrait un terme à la procédure d’arbitrage. Mais le président de la République, Paul Biya, a refusé cet arrangement.

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Convaincu de la volonté du Cameroun de poursuivre le développement du projet minier avec d’autres partenaires, la Cour internationale d’arbitrage de la Chambre de commerce international de Paris a saisi en juin 2021 l’Etat afin de l’obliger à lui accorder un permis d’exploitation sur ce gisement de fer, après la convention minière du 29 novembre 2012 et l’accord de transition du 30 juin 2015.

Affrontement au tribunal 

Ce différend intervient après plusieurs prorogations de la licence d’exploration de Sundance sur le projet. La junior minière australienne n’est pas parvenue à accrocher un partenaire technique et financier pour la mise en place des infrastructures relatives au projet minier de Mbalam (construction d’un chemin de fer plus de 500 km entre Mbalam et Kribi, de la mine et d’un terminal minéralier au port en eau profonde de Kribi). Des tentatives successives avec les sociétés chinoises China Gezhouba, en 2015 ; TidforeHeavy Equipment Group Ltd, en 2018, et enfin AustSino, à partir de 2018, ont toutes été couronnées d’échec.

Au tribunal, le 1er avril 2022, l’arbitre d’urgence a rendu une ordonnance provisoire contraignante obligeant le Cameroun à s’abstenir de délivrer le permis d’exploitation de Mbalam à toute partie autre que Cam Iron jusqu’à ce que l’arbitrage complet contre le Cameroun soit terminé ou qu’un groupe complet d’arbitres reconsidère cette position. Sauf que, le 16 juin 2022, le Cameroun a déposé une demande d’annulation de l’ordonnance provisoire de l’arbitre d’urgence du 1er avril 2022. Cette demande a été entendue par l’arbitre d’urgence le 5 juillet 2022 devant les représentants légaux de Sundance/Cam Iron et du Cameroun.

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Mais, le 20 juillet 2022, l’arbitre d’urgence a rendu sa décision, dans laquelle il a déclaré que « […] dans la mesure où la demande du Cameroun est recevable, elle est sans fondement et en conséquence [l’arbitre d’urgence] rejette la demande dans son intégralité ». Le 5 septembre 2022, le Cameroun s’est quand-même engagé à publier un décret présidentiel le 17 août 2022 qui délivrait un permis d’exploitation sur le gisement de Mbalam à une entité appelée Cameroon Mining Company SARL, qui n’avait été créée que quelques mois plus tôt. Ce décret était en contradiction directe avec les ordonnances rendues par l’arbitre d’urgence de la CCI.

Le Cameroun a également décidé de se tourner vers d’autres partenaires pour développer le projet minier, dont AutSinoResources Group Ltd et Bestway Finance. Ce que Sundance conteste devant les tribunaux estimant avoir été abusés par l’État du Cameroun et le Chinois AutSino qui a signé un contrat (volet chemin de fer) directement avec l’État, le 25 juin 2021 à Yaoundé.

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