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Affaire Danpullo – MTN : la justice place des banques sous astreinte de 100 millions Fcfa par jour

Dans une décision de justice rendue le 30 mai 2023 par le juge de référé au Tribunal de première instance (TPI) de Douala-Bonanjo, Eyango Dibobe Epoupa, SCB, Ecobank, UBA et Afriland doivent reverser dans un compte désigné au greffe les montants cantonnés sous astreinte de 100 millions de Fcfa par jour de retards. A MTN on accuse une tentative de braquage, les liquidateurs judiciaires Sud-Africains n'ayant mandaté personne pour poursuivre un recouvrement à MTN-Cameroun, Chococam et toute autre personne.

Il y a du nouveau dans l’affaire opposant Bestinver, groupe du multimilliardaire Baba Danpullo, aux filiales camerounaises supposées (MTN, Chococam) du sud-africain Public Investment Corporate (PIC). En effet, le 30 mai dernier, Eyango Dibobe Epoupa, juge au Tribunal de première instance (TPI) de Douala-Bonanjo, a condamné quatre banques au Cameroun (Ecobank, SCB, UBA Afriland) qui contestaient juridiquement, depuis septembre 2022, à exécuter une précédente décision de justice les obligeant à déposer dans un compte séquestre, un montant global de 143,9 milliards de FCFA appartenant à l’opérateur des télécoms d’origine sud-africaine, MTN Cameroun.

Cette décision fait aussi l’objet de contestation par le système bancaire appuyé par la Banque centrale pour qui l’article 52 de la réglementation Cobac du 21 décembre 2018 stipule que « les fonds reçus par un établissement de paiement de la part des clients en vue de la prestation de services de paiement restent la propriété des clients. Ils ne peuvent être utilisés qu’aux fins de réalisation d’opérations de paiement. Ils sont protégés contre tout recours d’autres créanciers de l’établissement de paiement, y compris en cas de procédure d’exécution ou de procédure collective d’apurement du passif ouvert à l’encontre de l’établissement ».

Certaines banques comme Afriland First Bank qui estime détenir un « pool account », précise que les fonds logés dans ce «pool account » étaient insaisissables au regard des dispositions règlementaires. Dans le jargon financier, le « pool account » renvoie à un compte bancaire dans lequel transitent les opérations des clients Mobile Money. En d’autres termes, le solde de ce compte n’appartient ni à MTN Cameroun ni à la banque domiciliataire mais plutôt aux clients.

Ecobank, SCB, UBA,…

En effet une précédente ordonnance prescrivait le cantonnement d’une somme de 126 milliards de FCFA censés appartenir à MTN dans ses livres. Selon les sources proches du dossier, c’est finalement le montant de 5 milliards qu’Afriland va devoir désormais reverser dans le compte séquestre du greffe sous astreinte de 100 million de FCFA par jour. Une version fortement démentie par l’entourage de Danpullo pour qui c’est le dépôt de la somme de 126 milliards qui est attendu sous astreinte de 100 millions de FCFA par jours. « Le juge a donné suite favorable à notre assignation en référé aux fins de cessation de voie de fait et ces banques doivent appliquer la loi du Cameroun et reverser le montant de 143,6 milliards attendus », nous laisse entendre une source proche du milliardaire camerounais qui ajoute : « la bataille est loin d’être finie. N’oublions pas que les premières ordonnances venaient en recouvrement de la somme de 243 milliards de FCFA au préjudice de MTN, MMC et autres vers le compte séquestre dont il est question. Cet objectif doit être atteins».  

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Approchée par EcoMatin, Afriland First Bank n’a pas souhaité s’exprimer évoquant la règle relative au secret bancaire qui consiste à ne pas divulguer des données de ses clients. Mais une source interne laisse entendre à EcoMatin que la banque est prête à collaborer avec la Justice « en tant qu’une banque respectueuse des lois et règlements en vigueur au Cameroun ».

En dehors d’Afriland, Ecobank, quant à elle, est condamnée à reverser dans le compte séquestre un montant de 4,5 milliards ; Société Commerciale de Banque Cameroun (SCB), 1,2 milliard et UBA Cameroun, 54 millions de FCFA. Ces trois derniers établissements bancaires devront payer 50 millions de FCFA de pénalités par jour de retard dans l’exécution de la décision de Justice. Pour le juge de référé Eyango Dibobe Epoupa, le refus de ces banques de reverser les sommes détenues dans leur compte est « irrecevable pour défaut d’intérêt ». Même si, apprend-on des sources judiciaires, Afriland First Bank et Ecobank, ont enclenché le processus de cantonnement des sommes saisies par la Justice.

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Co-liquidateurs judiciaire de Bastinver

Du coté de MTN, Me ABEN dénonce ue catastrophe judiciaire et une tentative de braquage qui n’honore pas le Cameroun. « Le juge a déclaré les interventions des liquidateurs de Bestinver South Africa et MTN non recevable pour défaut d’intérêt. Alors que c’est l’argent de MTN. Donc l’ordonnance de saisie conservatoire – sans validation du juge du fond -, est devenue un titre exécutoire. En fait le juge a substitué les banques aux débiteurs. C’est juste une catastrophe» déclare-t-il.

En effet, à la requête conjointe des liquidateurs judiciaires de Bestinver désignés par la justice sud-africaine, la SCP conseil Ngassam, Fansi, Djeutou et Mben avocats au Barreau du Cameroun ont déposé une assignation en intervention volontaire, le 30 mai dernier pour contester les manœuvres judiciaires entreprises par Baba Danpullo au Cameroun dans le cadre de cette affaire. Ils affirment dans cette assignation n’avoir mandaté personne à l’effet de poursuivre le recouvrement d’une créance quelconque et déclarent être les seules personnes légales habilitées à représenter la société Bestinver en liquidation judiciaire et à intenter des actions en son nom. Ces liquidateurs judiciaires affirment en outre n’avoir jamais mandaté quiconque pour poursuivre un recouvrement à MTN Cameroun, Chococam et toute autre personne au Cameroun.

Aux origines

Pour comprendre ce différent judiciaire, il faut remonter au 19 juin 2020. A cette période, les biens immobiliers de Baba Danpullo sont saisis et vendus en Afrique du Sud par la First National Bank (FNB). D’après cette banque, le Camerounais s’est retrouvé en situation d’insolvabilité. C’est-à-dire qu’il n’était plus en mesure de rembourser ses dettes depuis 2019. Mais, selon Baba Danpullo c’est un mensonge. Il s’agit plutôt de « spoliation ». Ses différents recours devant les juridictions sud-africaines pour contrer cette action de FNB sont restés vains.

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La maison-mère de MTN en Afrique du Sud a déjà lancé plusieurs contre-offensives pour faire annuler la saisie de 143 milliards de MTN et a également actionné la diplomatie des couloirs. Car, pas plus tard que le 4 avril dernier, Grâce Naledi Mandisa Pandor, ministre sud-africaine en charge des Relations internationales et de la coopération a été reçu à Yaoundé, la capitale du Cameroun, par le Premier ministre, Joseph Dion Ngute. Selon un tweet du chef du gouvernement, il a reçu Grâce Naledi Mandisa Pandor « au nom du chef de l’Etat ». Dion Ngute n’a cependant pas révélé les détails de cette rencontre. Il a juste déclaré de façon lapidaire : « Yaoundé et Pretoria en convergence de vues sur les grands sujets internationaux ». Sans plus. Mais nul ne doute que le sujet Danpullo était au menu des discussions entre les deux personnalités.

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