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Filière cacao : comment les torréfacteurs flouent les producteurs dans la région de l’Est

Ils justifient la retenue d’au moins 50 000 FCFA par tonne de produit achetée par le recouvrement de coûts de transport et d’amortissement de leurs camions.

Les membres de la coopérative des cacaoculteurs de Messok (CoopCa-Ecam) sont amers. Pour la saison en cours, sur plus de 300 tonnes produites, ils viennent d’écouler 70 tonnes de cacao à 67,2 millions de FCFA, soit 960 FCFA le kg. L’ire des cacaoculteurs de Messok se justifie par ce que, selon le président de la CoopCa-Ecam, Alidou Djaoro Abdoulaye, « à cause du mauvais état du réseau routier, les acheteurs acquièrent nos récoltes à des conditions inacceptables. Nous sommes obligés de composer avec les acheteurs de troisième main qui nous imposent le prélèvement d’une taxe de 50 000 FCFA par tonne de cacao achetée pour compenser les coûts de transport et d’amortissement de leurs véhicules entre Messok et Douala ». En réalité donc, rien que pour la vente de ce jeudi 2 décembre 2021, l’acheteur a retenu la somme de 3,5 millions de FCFA pour remettre à la coopérative 63,7 millions de FCFA.

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Le calvaire des cacaoculteurs de Messok, localité du département du Haut-Nyong située à environ 200 km d’Abong-Mbang, le chef-lieu, n’est pas unique dans la région de l’Est. Et ne se limitent pas qu’au cacao. « La plupart des acheteurs imposent des conditions d’achat en défaveur des producteurs », observe Djibril Eone, un encadreur technique très au fait des micmacs des acheteurs de produits agricoles dans cette partie du pays. « Dans le département de la Boumba-et-Ngoko, la pratique est au prélèvement de près de 100 000 FCFA par tonne vendue pour les mêmes causes », révèle un producteur qui a souhaité garder l’anonymat.

Pistes de collecte

« L’urgence de l’ouverture de pistes agricoles pour désenclaver les bassins de production est plus qu’à l’ordre du jour », indique le président régional de la plateforme nationale des organisations professionnelles agro-sylvo-pastorales et halieutiques du Cameroun, Mboble Dob. Pour qui, « la création du guichet de producteurs est l’une des solutions qui va accompagner la création et de l’ouverture des pistes de collecte dans les bassins de production, à ne pas confondre avec les pistes rurales ».

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En attendant, à Messok, les cacaoculteurs sont encadrés depuis 2015 par le Complexe intégré agropastoral et piscicole de Djoandjila (Ciap) Pour son promoteur, Cyprien Bamzok Ntol, « c’est au cours de la campagne électorale pour la présidentielle de 2011 que nous avons pris conscience du potentiel de la commune de Messok en la matière. Le projet de mise en terre d’un plant par militant chaque matin avant le démarrage des activités produit ses effets sur les communautés locales. »

Promesse est alors faite aux jeunes de « revenir pour un programme à plus large échelle ». En 2015, le CIAP revient donc y implanter une unité de promotion de la culture, de la transformation et de la commercialisation du cacao. A ce jour, plus de 150 000 plants ont été produits et distribués dans les zones de production.

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Pour mieux accompagner le projet, et « selon un modèle économique participatif », le CIAP a déjà investi plus de 8 millions de FCFA pour mettre en place un stock-revolving pour l’acquisition des produits phytosanitaires. Par ailleurs, la CoopCa-Ecam est attentive aux démarches administratives entreprises pour la mise en place d’un centre d’excellence de traitement du cacao. Son président, Alidou Djaoro Abdoulaye, pense alors qu’« à partir de techniques innovatrices que va offrir cette structure, notre cacao sera plus compétitif même à l’international ». Surtout que Cyprien Bamzok Ntol annonce « un investisseur camerounais prêt à acheter notre cacao à 1 800 FCFA le kg. Suffisant pour que nos producteurs n’aient plus de difficultés à s’acquitter des frais de scolarité de leurs enfants en vendant leur cacao au premier venu à vil prix ».

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