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Production d’arachide : des commerçants étrangers continuent d’assécher les stocks dans la région du Nord

Malgré la mesure suspensive d’exportation des céréales prise en décembre 2021 par la Direction générale des Douanes (Dgd), de nombreux producteurs dans les localités de Ngong et de Tcholliré continuent d’écouler leurs récoltes aux commerçants Tchadiens, Nigérians et même Gabonais. En conséquence, l’arachide se raréfie sur le marché, et les prix caracolent. En l’espace de 3 mois, le prix du sac d’arachide de 50kg a connu une hausse de 60% sur le marché local.

La région du Nord est l’un des plus grands bassins de production d’arachide au Cameroun. Elle pourvoit à elle seule plus de la moitié des quantités consommées sur le territoire national. Même si la filière reste l’une des plus mal loties du secteur agricole à cause de l’absence d’une structure faîtière qui encadre les producteurs, il n’en demeure pas moins vrai qu’elle revêt une importance capitale dans la vie économique du pays. La preuve, l’arachide fait partie de la liste des céréales interdites d’exportation par la Direction générale des Douanes (Dgd) en décembre 2021, à l’effet de stopper la flambée des prix sur le marché local et d’assurer l’approvisionnement des populations et de mieux lutter contre l’insécurité alimentaire. « Le service et les usagers sont informés que les opérations d’exportation de céréales (arachides) et des huiles végétales (Mayor, Azur, Neïma, Diamaor, Star oil et Pacific oil) produites au Cameroun sont suspendues à compter de la date de signature de la présente note de service », écrivait alors le directeur général de la Dgd, Fongod Edwin Nuvaga, dans une note à l’adresse des chefs secteur des douanes le 27 décembre 2021.

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Malgré cette mesure suspensive, l’arachide produite au Cameroun continue de quitter le territoire, a appris EcoMatin auprès de certains acteurs du monde agricole dans la région du Nord. Dans les localités de Ngong et de Tcholliré réputées pour leur culture de cette céréale, des commerçants étrangers des pays frontaliers, notamment le Gabon, le Tchad et le Nigeria, ont entrepris désormais d’acheter la totalité de la production sur des hectares de parcelles dès la période du labour des champs. Forçant au passage les producteurs à faire des récoltes précoces avant l’échéance convenue pour cet exercice. « Ce phénomène ne concerne pas que l’arachide. Ça concerne l’ensemble des céréales. Quand l’Etat met à notre disposition de l’argent pour acquérir des céréales, lorsque nous arrivons sur le marché, nous faisons face à une rude concurrence des Nigérians, des Gabonais, qui achètent l’essentiel de la production ; ensuite il y a les industries brassicoles etc. », déplore le directeur général de l’Office Céréalier, Mohamadou Gassimou, joint au téléphone par EcoMatin.

Hausse de 60% des prix

Cette situation occasionne inéluctablement une pénurie sur le marché local, avec pour corolaire une hausse vertigineuse des prix. Entre décembre 2021 et mars 2022, le prix d’un sac de 50kg d’arachide (décortiquée) est passé de 50 000 à 80 000 FCFA sur le marché local, soit une hausse de 60% en l’espace de trois mois. Une conjoncture amplifiée par le phénomène de récoltes précoces qui entrainent la rareté de cette céréale. Le GIC « Entr’aide », une organisation très active dans le monde agricole dans la région du Nord, mène depuis peu une lutte contre les récoltes précoces auprès des producteurs. « Cette année, j’ai essayé d’entretenir que les producteurs d’arachide (fraiche) en leur demandant de revoir les coûts liés aux ventes précoces, et d’ici la fin de ce mois, nous aurons une réunion d’évaluation. Ils livrent leurs produits trop moins chers, soit à 2000 ou à 2500 FCFA pour un sac de 25kg, et c’est l’acheteur qui leur impose les prix. Ils se voient parfois obligés d’accepter à cause de la misère qu’ils vivent au quotidien sans évaluer le coût des dépenses », confie dame Tizi, présidente du GIC « Entre’aide ». Il faut souligner à titre d’illustration que chaque année, révèle une étude du Bureau de mise à niveau des entreprises (BMN), environ 70% de la production de riz au Cameroun (80% des espaces aménagés pour cette culture se trouvent dans le Nord et l’Extrême-Nord) est exportée vers le Nigeria. Ce qui est fort révélateur de la saignée des céréales camerounaises vers l’extérieur.

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